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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

vendredi 24 avril 2020

SERAFIN-PH : modernisation ou risques?

SERAFIN-PH : modernisation ou risques ?


La réforme engagée depuis déjà plusieurs années par SERAFIN-PH (pour Services et Etablissements : Réforme pour une Adéquation des FINancements aux parcours des Personnes Handicapées) se propose de faciliter la fluidité des parcours des personnes handicapées et la transformation des offres d’accompagnement, en mettant leurs besoins en adéquation avec les réponses qui peuvent leur être apportés, celles-ci étant déclinées sur deux registres : les prestations directes (soins et accompagnements) et les prestations indirectes (pilotage et fonctions supports). La modernisation du système prend la suite d’autres modernisations des systèmes étatiques, avec la même touche technocratique mainstream, celle qu’on retrouve dans la réforme de l’hôpital et des services publics, soucieuse de bonne gestion et de performance, en réalité de restrictions de ressources et d’économies.

On retrouve dans le langage argumentatif de cette réforme les mêmes registres que dans la réforme qui a modernisé depuis une vingtaine d’année le système de santé et l’hôpital. Ainsi la tarification à l’acte à l’hôpital, mise en place dans les années 2000 préfigure-t-elle une tarification à l’activité que l’on voit se profiler dans SERAFIN-PH, facilitée par l’adéquation qui devra être mis en place entre un besoin, une activité et une ressource. La logique de SERAFIN-PH est la logique de la tarification à l’acte de l’hôpital, améliorée dans un sens d’efficacité et de performance, vue du côté d’une approche technocratique gestionnaire.

Evidemment, ce n’est pas le discours qui est tenu par les promoteurs de cette réforme. Dans un texte, publié par le Secrétariat d’Etat chargé des personnes handicapées et la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie début 2020, il est dit que la réforme « a vocation à être équitable, lisible, et doit faciliter des parcours de vie fluides personnalisés », ce qui rappelle parfois douloureusement un certain nombre de réformes qui sous les mêmes vocables vocationnels produisaient exactement l’inverse.

Ce fut le cas de la réforme de l’hôpital dont les effets ont cyniquement été mis en évidence par la pandémie du COVID.19. La transformation de l’offre de soins en santé publique a aussi été entreprise, selon les termes officiels, en tant que modernisation et transformation, efficience et performance, amélioration des parcours de soins, etc. Les effets observables consistent en des réorganisations de services, avec suppression de lits, de postes et de matériels, afin de viser à une gestion des flux, à l’image des entreprises. Bien avant que la pandémie n’acte la faillite du système (préservé toutefois grâce à l’engagement des soignants), les acteurs de l’hôpital n’ont eu de cesse de dénoncer les conditions de fonctionnement qui se dégradaient de jour en jour au nom de cette réforme. Dénonciations renvoyées à de l’incompréhension des réformes en cours, à des résistances anachroniques, à des avantages acquis indus. Tout cela au nom du bien du patient, et au nom de la performance du système. Et même la crise n’a pas entamé la foi des responsables, puisque l’on a vu un directeur d’ARS, en pleine crise, maintenir ses objectifs de suppression de postes et de lits !

Que le secteur médico-social ne fonctionne pas de manière satisfaisante au regard des droits, des besoins et des aspirations des personnes en situation de handicap ne fait aucun doute. Pas plus que le fait que des ressources publiques dont il dispose ne soient utilisés parfois à mauvais escient. Mais modifier (moderniser et transformer dit-on) dans une configuration et sur un registre idéologique qui ont fait montre de leurs impasses dans d’autres secteurs devient incompréhensible. Les anticipations de cette réforme, que l’on observe dans des CPOM (contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens) dont la signature est la plupart du temps soumise à une réduction de ressources, ou encore dans des appels d’offre sélectionnés bien souvent sur l’offre la moins-disante sur le plan financier, préfigurent le cadre d’une réforme qui, au-delà de l’utilisation de mots disant l’inverse de ce qu’ils font, fait courir d’énormes risques aux populations concernées.

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