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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

jeudi 25 avril 2024

"même pas le temps de faire mon boulot"

"Même pas le temps de faire mon boulot !"

C’est l’heure d’une petite pause-café pour quelques professionnelles d’une équipe médico-sociale. « Oh ! il m’embête, X, dit l’une d’elle, éducatrice spécialisée. Qu’est-ce qu’il est collant, il n’arrête pas de venir me solliciter, il me demande toujours des trucs, il veut toujours savoir si ce qu’il fait c’est bien, tout ça… Pfff ! Il m’empêche de faire mon boulot. » - « Ton boulot ??? » - « Ben oui, je n’ai plus le temps avec lui de remplir mes tableaux Excel, de compléter le dossier informatisé des usagers, de faire mon reporting, tous les trucs qu’on a à faire là… ». Nul doute que le zèle que met cette éducatrice à faire le travail prescrit par les différents référentiels, recommandations et procédures sera la garantie d’une bonne évaluation interne et externe de qualité de services et prestations, qui trouverait grâce auprès d’une quelconque agence de la performance. Elle a le souci de renseigner les différentes grilles et documents (c’est son boulot), et ceux-ci attesteront de l’efficience des prestations, c’est-à-dire de l’adéquation entre ce qui sera déclaré réalisé et les critères établis de l’offre de services et des prestations, au nom de la bonne gestion et administration de l’activité.

Le discours de l’éducatrice est ici le symptôme d’un transfert, d’un déplacement de la notion de travail bien fait. Il y a un déplacement de la définition du travail bien fait du registre de la relation avec l’usager, avec ses imprévus, les caractéristiques de la personne (eh oui, il est collant, ce n’est pas toujours prévu dans le travail prescrit !) au registre de la conformité à des normes de fonctionnement établies, certes au nom de valeurs universelles restant cependant relativement formelles (pour le bien des personnes), mais surtout au nom d’une bonne gestion et administration, selon un certain évangile libéral ou néolibéral, des offres de service. Le « travail bien fait » a migré de la relation à la gestion.

Le discours et le texte sociétaux ont beau clamer la nécessaire bienveillance, le refus de toute maltraitance, la dignité des droits, les pratiques contraintes par l’adéquation aux critères de la « bonne » gestion ne sont pas à même de pouvoir y souscrire. Dans l’aide à domicile, autre secteur dont la nature du travail s’est déplacée, pour une personne pas trop dépendante, l’aide au repas est décomptée pour 15 minutes : arrivée, sortir le plat du frigo, le mettre à réchauffer dans le micro-ondes, mettre la table, et repartir. Le respect de cette prestation, avec le chronométrage programmé, est un gage de la qualité voulue de la prestation au regard de la gestion des ressources et de la rationalité de la professionnalisation ( !). Mais que doit faire la professionnelle si elle voit que la vieille dame est un peu déprimée, qu’elle cherche à lui prendre la main, qu’elle demande à lui parler un peu…Ce n’est pas prévu, la professionnelle ne doit pas « céder » sous peine de déroger aux procédures exigées, et compromettre les critères qualité. Elle doit laisser cette dame dans la détresse parfois. Si ce n’est pas de la maltraitance…

Des secteurs entiers ont ainsi été soumis à des impératifs gestionnaires censés, toujours, améliorer la situation des personnes bénéficiaires. Et ce sont ces impératifs qui finissent pas définir toute la vie humaine des personnes, en définissant les besoins au regard de ces impératifs. Il s’agissait d’améliorer les services d’aide à domicile par la mise en marché et en concurrence. Il s’agissait d’améliorer la qualité des soins des patients dans les réforme successives de l’hôpital et du système de santé. Et que dire de la privatisation lucrative des EHPAD ! Ce sont les conditions générales d’usage qui se sont dégradées, à côté de quelques améliorations. Avec SERAFIN-PH dans le secteur médicosocial, on est dans le même registre. Mais au moins là sans hypocrisie : il s’agit d’une réforme du financement avec la mise en adéquation des besoins avec les prestations. C’est la gestion des ressources qui commande la nomenclature des besoins. Ce ne sont plus les relations humaines entre un accompagnant et un accompagné qui ont de la valeur, c’est la nomenclature de la vie telle qu’elle doit être au regard de la rationalité gestionnaire et administrative.

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lundi 15 avril 2024

Inclusion versus éducation inclusive

Inclusion versus éducation inclusive

 L’inclusion (ou l’éducation inclusive), si présente dans le discours institutionnel, est-elle une valeur (une éthique) si partagée ? On a vu il n’y a pas longtemps un syndicat d’enseignants s’insurger contre la poursuite de l’inclusion et réclamer que les élèves handicapés puissent être ségrégués dans des institutions spécialisées. Mais on voit aussi des décisions politiques, à rebours des discours tenus par les mêmes acteurs, nuire à la perspective inclusive : maintien d’une organisation scolaire séparatiste et inégalitaire, restriction de moyens, absence de formations, dispositifs d’organisation sélectifs et ségrégatifs (orientation, classes de niveau…), élèves handicapés non scolarisés…

lundi 8 avril 2024

l'inclusion, une impasse ?

 L'inclusion, une impasse ?

Et si l’inclusion, dont on voit bien aujourd’hui, au-delà d’un consensus de façade, qu’elle se heurte à de sérieuses limites et contestations, était pensée selon un modèle qui relèverait d’une véritable aporie ? Malgré les ajustements sémantiques et conceptuels que l’on trouve dans les termes d’éducation inclusive et d’école inclusive, il reste que l’inclusion relève encore de la définition qui lui a été attribuée lorsqu’elle a remplacé la notion d’intégration dans la première décennie de ce siècle. C’est d’ailleurs pour cette raison que la plupart du temps, les différentes terminologies sont indifféremment utilisées. Dans ce registre persistant, l’inclusion scolaire concerne un ensemble de dispositifs déployés auprès des enfants handicapés, auxquels s’adapte l’école, en mettant en place diverses compensations et aménagements spécifiquement destinés à celles et ceux dont les besoins ont été identifiés comme relevant des caractéristiques personnelles déficitaires (déficiences, troubles, incapacités, limites). Les dispositifs d’intégration demandaient à l’enfant handicapé de s’adapter au fonctionnement de l’école, de laquelle il était rejeté s’il ne s’adaptait pas. Les dispositifs d’inclusion s’adaptent spécifiquement, particulièrement, à cet enfant, en raison des problèmes qu’il présente, issus de ses caractéristiques personnelles. Ainsi, une classe présente des élèves « normaux » et un élève « différent » auquel il convient de s’adapter par compensation et aménagement.

mardi 2 avril 2024

comment accueillir un élève handicapé dans sa classe ?

Comment accueillir un élève handicapé dans sa classe ?

Il est convenu d’affirmer que les enseignants doivent se former afin d’accueillir des élèves handicapés dans leur classe. Tout dépend de quelle manière. Il y a en définitive deux manières, ou postures, de formation ou d’auto-formation. La première consiste à prendre connaissance des caractéristiques de tel ou tel élève concerné, et de mettre en place des dispositifs qui lui conviendront. La seconde consiste à s’interroger plus globalement sur les dispositifs d’enseignement mis en place pour les rendre accessibles et adaptés à tous les élèves, dont spécifiquement celui concerné. Les deux postures n’ont pas du tout les mêmes enjeux, ni les mêmes principes éthiques.