Une sanction en raison du handicap
Un jeune garçon, Thierry, avec un diagnostic de troubles des
apprentissages (caractérisés par la dysphasie et de la dyslexie) est orienté
vers un Institut d’Education Sensorielle accueillant cette catégorie de
population. Le dispositif dans lequel il est accueilli (une classe spécialisée)
est externalisé dans un collège, permettant une participation sociale sur les
temps non scolaires (récréations et temps de restauration) et une participation
scolaire sur quelques rares temps de cours dans les classes de collège.
Participation scolaire qui n’a été mise en place non sans quelques résistances
d’ailleurs : effectifs non pris en compte dans le décompte de la classe,
en trop donc ; exigence de la présence de professionnels spécialisés avant
même toute analyse des besoins des jeunes, etc.
A l’occasion d’une manifestation, une fois de plus, d’un
fait de violence, pas plus grave que d’habitude (bousculade d’un élève qui
selon lui ne le laissait pas passer), la principale du collège menace, avec une
certaine violence, Thierry d’une exclusion définitive, lui interdisant de fait
la possibilité de poursuivre son parcours de scolarisation : en effet, sa
scolarisation étant effectuée dans un dispositif externalisé, son exclusion du
collège valait absence de solution de scolarisation. L’orientation de la MDPH
« dispositif spécialisé avec temps partagé en collège » était ainsi
remise en cause puisque le principe même de ce parcours de scolarisation (présence
dans un collège) était retenu comme pertinent pour cet élève et le groupe
d’élèves dans lequel il se trouvait. La menace valait donc exclusion du
collège, et exclusion de toute scolarisation, et il aurait fallu mettre en place
une solution ségrégative de scolarisation dans les murs d’un établissement
spécialisé.
Le plus curieux était que Thierry n’avait pas le monopole
d’une telle manifestation de violence, mais qu’il fut le seul à subir cette menace.
D’autres collégiens, certes peu nombreux dans ce collège outrepassaient leurs
droits d’expression dans des manifestations de violence. Légitimement, ils
étaient sanctionnés : colles, exclusion temporaires, entretiens de
cadrage… Mais, même pour des violences plus importantes, jamais la menace
d’exclusion définitive ne fut prononcée.
Il se trouvait simplement que Thierry gênait quelque part le
bon fonctionnement de l’établissement. Et que le dispositif externalisé de jeunes
handicapés gênait aussi le fonctionnement de l’établissement. Pour certaines
raisons légitimes certes, l’absence d’inscription réelle impliquant un
surnombre par exemple.
Mais plus profondément, c’est la place même de ce dispositif
et de ces élèves qui était remise en cause : que faisaient-ils là, alors
qu’ils seraient si bien entre eux, dans un autre lieu. D’ailleurs, cette
violence de Thierry, est-il normal que cela se passe au collège ? Derrière
l’accueil « souriant » de façade, exigé par le consensus politique de
l’inclusion, se cache en définitive le refus d’accueillir de tels élèves, qui
dérogent à la norme fantasmée du collège. Le handicap (et ce que cela implique)
est bien l’argument, caché mais fondamental, de la sanction (ou de sa menace),
et la légitimation de l’exclusion, et la violence d’un jeune handicap l’alibi
de la sanction et de l’exclusion.
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