Liberté de choix, consentement et adhésion
Les personnes en situation de handicap, en tant qu’usagers (ou parents lorsqu’ielles sont mineur·es) du système médico-social ont en principe le libre choix des prestations qui leur sont attribuées, dès lors qu’elles ont été orientées, normalement en fonction de leur demande, souvent confondue avec leurs besoins. La notion de libre choix est conforme (et même plus : requise) aux droits reconnu aux personnes en situation de handicap dans la Convention des droits des personnes handicapées de l’ONU (2006). Elle est aussi conforme aux principes de la législation française (loi de 2005). Le libre choix peut et doit être « éclairé » : les informations transmises aux personnes concernées doivent être complètes et accessibles. Dans le cadre du libre choix, par exemple, des parents qui feraient le choix de voir leur enfant scolarisé dans l’école de leur quartier, avec éventuellement un accompagnement, devraient voir leur demande satisfaite lorsqu’il s’agit d’un choix éclairé, avec les moyens qui accompagnent ce choix. Ou encore, lorsqu’une personne handicapée manifeste le souhait d’habiter un appartement individuel en ville, elle devrait pouvoir le faire.
Comme le montrent les situations de vie, de nombreux
obstacles s’opposent à ce libre choix. L’enfant ne sera pas (malgré son droit à
l’être) scolarisé en établissement « ordinaire » (l’école ne le
souhaite pas, il n’a pas le niveau, le bon comportement, il court des risques
et il en fait courir aux autres, les experts déclarent que ce n’est une bonne
orientation, …) et une orientation sera proposée en établissement spécialisé.
L’adulte handicapé demandant un logement sera considéré comme manquant
d’autonomie, nécessitant protection, justifiant par là une orientation en foyer
spécialisé.
D’où vient que cette notion de libre choix éclairé se
traduise in fine par des « choix contraints », c’est-à-dire en
définitive des non choix. Peut-être faut-il remonter en amont, dans la loi de
2002 sur la rénovation de l’action sociale et médico-sociale, à la notion de
« consentement », éclairé lui aussi. La notion de consentement est
pour le moins ambigüe, et pourrait même s’opposer à la notion de libre choix.
Le consentement, même éclairé, suppose en effet que quelque chose d’extérieur
nous soit proposé, sans alternative comme cela peut l’être dans un choix, et
que l’on y donne son accord, que l’on y consent. A un usager, sont proposées
par l’établissement ou le service différentes prestations (par le contrat de
séjour, le projet personnalisé d’accompagnement…) auxquelles on lui demande de
consentir, normalement en toute connaissance de cause. Mais sans avoir d’autre
choix : tout au plus peut-il en refuser quelques-unes.
Le consentement, dit la loi, doit être recherché lorsque la
personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Mais que
se passe-t-il lorsqu’elle dit non ? ou qu’elle a fait d’autres
choix ? La plupart du temps, tant dans l’orientation que dans les
prestations d’accompagnement, ce qui est proposé s’impose, faute de quoi la
personne est disqualifiée et se retrouve avec une absence de solution. Le
consentement devient une adhésion forcée, adhésion qui fait même parfois partie
d’objectifs professionnels (objectif d’un PIA : travailler avec la famille
pour qu’elle adhère au projet d’internat de leur enfant !)
Dans les pratiques professionnelles et institutionnelles, c'est ainsi que cela se passe. La co-élaboration du projet personnalisé n'est bien souvent que la transmission et la demande d'adhésion aux contenu d'un projet pensé préalablement par l'établissement ou le service. Les besoins nomenclaturés dans la réforme SERAFIN-PH, réduisant d'ailleurs les personnes à une liste de ces besoins, sont des caractéristiques définies par les différentes expertises professionnelles concernant essentiellement les incapacités, parfois loin de la demande des usagers. Les demandes des usagers hors prestations proposées pourraient rapidement être considérées comme irréalistes, utopiques, non raisonnables, et à ce titre disqualifiées et hors sujet, loin d'un libre choix.
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