Les résistances défectologiques et validistes
Les représentations ont la peau dure. Parfois masquées par des discours « progressistes », voire émancipateurs, les représentations, bâties sur des héritages archaïques, guident et inspirent les pratiques, les comportements, les attitudes, les réactions. Cela se voit par exemple dans la résistance masculine à l’émancipation féminine, dans laquelle surgissent les vieilles représentations de la supériorité masculine. Cela s’observe aussi dans la résistance à l’égalité et l’émancipation des personnes en situation de handicap par la persistance de représentations défectologiques, ou validistes, mettant les personnes en situation de handicap dans une position infériorisante à partir des caractéristiques corporelles ou d’aptitudes.
Pourtant les discours, consensuels, affichent des approches
qui semblent aller à l’encontre de ces résistances. Les intentions ne sont pas
en cause. Au niveau discursif, il y a, de manière générale, consensus et convergence
pour favoriser les situations des personnes en situation de handicap :
autonomie, autodétermination, empowerment ou pouvoir d’agir, liberté de
choix, accès aux droits. Ce discours est largement porté par les instances politiques
ou de décision comme par les acteurs, y compris décisionnaires, dans les
organisations et les services impliqués dans l’accompagnement de ces personnes.
Et pourtant, ce sont encore d’anciennes représentations qui président aux
relations avec les personnes, aux organisations de l’accompagnement et aux
pratiques. Et pourtant, les habitudes, les réflexes, les organisations sont
instituées selon des représentations anciennes. La communication officielle, mainstream,
est en contradiction avec un cadre théorique et pratique, un modèle constitué
d’une approche bio-médicale et défectologique (déficitaire) du handicap.
Un enfant a-t-il des difficultés d’apprentissage à
l’école ? Immédiatement, il est adressé aux médecins afin de déterminer
s’il n’y a pas de handicap. Et lorsqu’un diagnostic est posé, c’est
immédiatement un traitement médical et/ou paramédical qui est prescrit, sans se
poser la question de en quoi l’école peut elle-même contribuer à ces
difficultés et comment elle pourrait s’adapter aux difficultés en question. Cette
situation confirme l’idée que les enfants handicapés sont des enfants
« non ordinaires », qu’ils constituent une catégorie particulière, en
dehors, ou plutôt en dessous, des normes « ordinaires ».
Dans les contraintes de développement de l’école inclusive,
la formation des personnels est une exigence. Mais sur quoi porte le plus
souvent la formation ? Sur la connaissance des déficiences, troubles,
maladies et des incapacités qui en seraient les conséquences, renforçant ainsi
l’idée que le handicap est l’affaire des caractéristiques personnelles des
personnes concernées, nullement que les situations de handicap dépendent de la
personne ET de l’environnement. La conséquence d’une telle approche, c’est
qu’il faut rééduquer, réadapter, corriger, les caractéristiques de l’enfant,
par des spécialistes, inévitablement experts paramédicaux et extérieurs à
l’école, sans se préoccuper du fonctionnement pédagogique en dehors de quelques
adaptations spécifiques à l’individu concerné. Tout le contraire d’une école
inclusive !
Le nouveau modèle voudrait que l’on considère le handicap
comme un problème de société et non comme un problème de santé. Mais que penser
alors du fait que dans les MDPH, ce soit le « Guide barème pour l’évaluation
des déficiences et des incapacités des personnes », document faisant
référence indiscutablement à des critères et à une approche bio-médicale et
défectologique, qui vaut pour l’accès à
un certain nombre de droits des personnes, nonobstant l’équipe
pluridisciplinaire qui ne peut plus que s’y résoudre. On pourrait ainsi
multiplier les exemples : l’approche ancienne du handicap, bio-médicale et
infériorisante, est bien présente dans le quotidien qui concerne les personnes
en situation de handicap.
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