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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 11 mai 2020

de la protection à l'égalité et aux droits

De la protection à l'égalité et aux droits


Longtemps, la prise en charge des personnes en situation de handicap a relevé du modèle de la protection, pensée et organisée sous différents registres et dispositifs. La protection n’avait pas une finalité univoque : s’il y avait lieu de protéger les personnes concernées, il y avait lieu aussi de protéger la société de ces personnes. La protection a pris diverses formes : l’éloignement (les institutions à la campagne) l’enfermement (les institutions fermées s’inspirant de la prison ou des monastères cloitrés), la surveillance (en particulier des personnes présentant un danger pour la société). Le cadre conceptuel de la protection puisait ses racines dans une représentation des personnes en situation de handicap comme étant « incapables », n’ayant pas toutes les capacités (physiques, intellectuelles, sensorielles, mais aussi psychiques ou morales) d’être comme les « normaux ».

A la protection s’est rajoutée, simultanément ou plus tardivement, l’idée d’éducation et de réinsertion dans la société (en particulier dans le travail). Mais l’incapacité restait une donnée « ontologique », qu’il fallait compenser par diverses mesures et des rééducations, celles-ci ayant pour finalités de rendre les personnes concernées le plus proche possible de la norme sociale instaurée. Mais même dans cette configuration, la balance entre la protection et l’autonomie (l’autodétermination) penchait en faveur de la première, avec comme effets l’infantilisation des personnes, l’absence de droits et de choix, et même parfois de la maltraitance inacceptable.

Avec la prise de conscience des droits humains pour tous (pour la « catégorie » handicapés, comme pour d’autres catégories : femmes, homosexuels…), il y a eu un renversement de problématique. L’égalité pleine et entière est dorénavant revendiquée et, davantage qu’une protection (enveloppante, recouvrante, étouffante), c’est d’un appui (quelque chose sur lequel on peut s’appuyer), dont il va s’agir dans la pensée et l’action. Avec cette perspective d’égalité, émerge également l’importance des dispositifs d’accessibilité, et par conséquent celle d’un changement social et sociétal, dans la manière dont la société conçoit ses rapports avec les personnes en situation de handicap. Il n’est pas anodin par exemple que la « prise en charge » ait été remplacée par la « participation sociale, ou la « valorisation des rôles sociaux ».

Les personnes en situation de handicap ont-elles perdu dans cette mutation les conditions de protection dont elles bénéficiaient auparavant en tant que personnes vulnérables ? Oui, elles ont perdu les conditions infériorisantes, excluantes, stigmatisantes, liberticides, discriminantes, que les institutions classiques leur imposaient. Elles ont gagné des conditions d’autodétermination, de liberté, de choix de vie, d’émancipation et de développement, de valorisation de leurs rôles sociaux, de participation sociale, qu’elles n’avaient pas auparavant.

Elles ont aussi gagné des risques, ceux de bon nombre de personnes et qui sont aussi inhérents à une société inégalitaire et injuste. Dans cette société qui a tendance à considérer que chacun est responsable de son bonheur ou de son malheur (les pauvres sont responsables de leur pauvreté, les chômeurs de leur inemploi…), chacun est soumis à la violence sociale. Même si les personnes en situation de handicap sont encore marginales par rapport à cette tendance, on n’est pas loin de considérer qu’elles devraient faire la preuve de leur résilience puisqu’on leur a donné l’autodétermination, de leur volonté d’être comme les autres (flexibles, agiles et réactifs), de la mise en œuvre de certaines des capacités qui pourraient attester de leurs mérites, pour prétendre à l’appui dont elles ont besoin.

S’il y a lieu de s’inquiéter de l’absence de protection, c’est à la société qu’il faut imputer les insuffisances, mais à la « nature » du handicap. La protection n’a pas été remplacée par une véritable égalité des chances et des droits faute de changements dans les institutions de la société.

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