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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

mardi 26 mars 2024

des représentions archaïques du handicap

Des représentations archaïques du handicap

C’est agaçant ! On croit que, concernant les situations de vie des personnes en situation de handicap et leur accès aux droits fondamentaux, les choses se sont beaucoup améliorées. On présume que l’on ne penserait plus, comme auparavant, que le handicap serait une attribution, une « propriété » de la personne, et que les conditions environnementales jouent un rôle dans les difficultés de participation des personnes, dans les situations de handicap qu’elles rencontrent. On se dit que les évolutions conceptuelles (Classifications internationales, convention des droits des personnes handicapées), que les évolutions des offres de service et les recommandations de bonnes pratiques, que les prises de parole des personnes concernées dénonçant le validisme, que les discours inclusifs et d’autodétermination, ont modifié substantiellement le regard porté sur les personnes concernées et sur les représentations négatives liées à la notion de handicap.

Et patatras ! Le langage utilisé trahit (et révèle) les tréfonds d’une mentalité archaïque, de représentations révolues persistantes. Certes on ne manque pas d’affirmer le rôle de l’environnement, mais dans le même temps on le nie en qualifiant une situation de handicap de « sensorielle, intellectuelle, motrice ou psychique ». Ce faisant, on renvoie la cause essentielle, l’origine, la caractéristique du handicap aux caractéristiques corporelles (physique ou psychique) de la personne, comme le faisaient les anciennes approches individuelles bio-médicales. On désigne par cette formulation les conséquences d’une déficience ou d’une incapacité dans le champ social, comme le faisait il y a 40 ans la première classification du handicap (CIH).

Certes, pourrait-on objecter, ce n’est que du langage, cela ne représente pas les profondes évolutions conceptuelles et de pratiques. Ce n’est pas si sûr, le langage est « symptomatique » de bien des choses. Parmi ses fonctions, il a celle de représenter, mais aussi, en étiquetant, celle d’organiser la perception du monde. Et ici, on peut légitimement penser que les nouvelles formulations ne font qu’étiqueter une réalité qui change peu, légitimant ainsi l’existence telle quelle de celle-ci comme une réalité satisfaisante, qui répond aux prototypes annoncés, évitant des formulations devenues « honteuses » (handicap, incapacité, déficience), en en enlevant simplement l’aspect honteux, aussi sordide que reste la réalité.

Il y a manifestement une erreur de conception dans la « localisation » et dans la définition des situations de handicap. Une situation, quelle qu’elle soit, n’est pas dans la personne. Une situation existe dès lors qu’une personne se trouve à vivre, c’est-à-dire se trouve à réaliser quelque chose dans des situations de vie. Les situations de vie (les habitudes de vie comme les nomme le MDH-PPH) font l’objet d’un ajustement plus ou moins réussi entre une personne, avec des caractéristiques singulières, et l’environnement dans lequel elle vit. La situation de handicap n’est pas dans une personne qui ne marche pas, une personne qui ne parle pas, une personne qui mémorise mal. Pour ces personnes, les situations de handicap se situent dans des activités humaines « socialisées » : dans les entraves dans les déplacements, dans les difficultés dans les relations personnelles, dans les ralentissements de rythme des apprentissages scolaires. Il n’y a pas de « situation de handicap moteur », mais une possibilité de difficultés plus ou moins importantes dans les déplacements, et par conséquent une situation de handicap, s’il n’y da pas de fauteuil roulant, ou s’il y a des trottoirs encombrés.

Alors oui c’est agaçant ! Entendre dans les médias, chez les professionnels, chez les dirigeants des expressions telles que « situation de handicap moteur » manifeste une incompréhension majeure de la notion de situation de handicap (ou de situation de participation sociale), et la persistance d’une représentation archaïque de ce qu’est une personne en situation de handicap, en « oubliant » en réalité comment est produite une situation de handicap.

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