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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 4 septembre 2023

"Notre enfant attend une place en IME"

"Notre enfant attend une place en IME"

Comment ne pas compatir au désespoir de ces milliers de parents dont les enfants en situation de handicap n’ont de place nulle part, ni à l’école où on n’en veut pas, ni en établissement spécialisé où il n’y a pas de place. Face à cette situation dramatique, les associations et les parents mettent en avant le plus souvent la demande de création de places en établissement spécialisé. Et si la question était mal posée ? Ne devrait-on pas plutôt poser la question en ces termes : pourquoi ces enfants n’ont-ils pas de place à l’école et pour quelles raisons devrait-ils être orientés en IME ?

La réponse convenue, à rebours des textes et orientations nationales et internationales, est, déguisée sous divers arguments, dissimulée sous divers arguments : il n’a pas sa place à l’école parce qu’il est handicapé : bien sûr, « il n’a pas le niveau », « il n’a pas le comportement adapté », « mes méthodes pédagogiques ne peuvent pas lui convenir », «  il est malheureux, il souffre, il est harcelé », « il est mieux avec des comme lui », etc. Réglementairement et humainement, ces (fausses) raisons ne devraient pas être invoquées. L’école n’a pas à discriminer ceux qui pourraient y participer et ceux qui ne le pourraient pas. Les arguments ci-dessus constituent des propos discriminatoires. Mais c’est un acte de discrimination qui s’autojustifie dans et par l’organisation du système éducatif, à un niveau structurel. Car ne pas discriminer n’est pas seulement de l’ordre des principes éthiques. C’est aussi de l’ordre des moyens mis en œuvre par le système afin d’éviter les situations de discriminations. Les moyens en question dépendent bien sûr des acteurs de terrain (postures, valeurs, attitudes, méthodes pédagogiques…) ; mais ils dépendent aussi, et peut-être surtout (car ils cadrent les acteurs de terrain) des choix politiques d’organisation de la politique publique éducative : formation des enseignants, dotations d’accompagnement (des AESH ou du médico-social), conditions de travail, effectifs des classes, moyens contre les inégalités, …, au-delà des discours de principe sur l’école inclusive.

Dans une société inclusive fonctionnant avec une école inclusive, on ne devrait pas entendre qu’un enfant en situation de handicap attend à la maison faute de place dans un établissement spécialisé. On devrait plutôt entendre « mon enfant attend d’être accueilli à l’école, avec des moyens et des ressources appropriées ». On peut admettre toutefois, peut-être de manière transitoire, que certains enfants qui rencontrent des situations complexes et difficiles de handicap pourraient avoir des difficultés à tirer bénéfice de leur présence dans une école, malgré tous les efforts que pourrait produire celle-ci. Peut-être faudrait-il penser pour ces enfants des dispositifs spécifiques, partiels de préférence. Tout en sachant que de tels dispositifs spécifiques sont par nature discriminatoires et ségrégatifs.  C’est peut-être ce type d’organisation éducative qui définit ce que pourrait être une transition inclusive. On en est loin : le nombre d’enfants handicapés orientés en établissement spécialisé a peu décru depuis la loi de 2005 c’est donc que l’école ne leur est guère plus accueillante.

Augmenter le nombre de places en IME ou en établissement spécialisé (comme le demandent de nombreux parents et associations gestionnaires de ces établissements) ou ne pas les augmenter sont des choix politiques identiques : maintenir la discrimination, soit par la ségrégation éducative, soit par le maintien à la maison. Car ces choix vont de pair avec un délaissement, voire une dégradation des conditions de fonctionnement de l’école, qui interdit, pratiquement et politiquement, de mieux accueillir les enfants en situation de handicap dans une école qui pourtant se prétend inclusive et juste. Si l’on veut considérer les enfants en situation de handicap comme de plein droit dans la société, il y a urgence à doter l’école des ressources nécessaires (moyens matériels et humains) pour la transformer, pour la faire passer d’une école inégalitaire, excluante et élitiste, à une école qui se préoccupe qualitativement de tous les élèves.

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