biographie

Ma photo
Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

mardi 19 septembre 2023

les apparences de l'inclusion

Les apparences de l'inclusion

Dans les années 1980, une célèbre marque de boissons gazeuses a utilisé une formule publicitaire qui fit florès. « Ça ressemble à de l’alcool, c’est doré comme l’alcool, mais ne n’est pas de l’alcool ! » Ainsi pourrait-on qualifier aujourd’hui l’inclusion et les dispositifs inclusifs en France : cela ressemble à de l’inclusion, cela utilise le même langage, mais ce n’est pas de l’inclusion. Que l’on parle aujourd’hui, pour désigner comment les personnes en situation de handicap participent de la vie sociale, d’inclusion, de société inclusive, de transition inclusive, d’inclusivité, etc. Les formules sont bien éloignées de la réalité vécue par les personnes concernées. Oui bien sûr il y a eu des progrès, des évolutions, dont d’ailleurs les responsables politiques ou administratifs s’enorgueillissent : des réglementations, des dispositifs, une communication généreuse, sans compter les numéros verts !

Mais fondamentalement, justement, ce sont seules ces petites choses qui changent, sans les changements structurels qui seraient nécessaires pour faire valoir l’effectivité des droits et une pleine participation sociale, et dont on se garde bien évidemment de parler. La situation des élèves handicapés à l’école est emblématique de ces choix politiques. Des plans se sont succédés (par exemple les plans autisme), les dispositifs se sont multipliés (ULIS, UEE, UEMA, DITEP, ….), l’idée que l’accueil de ces élèves était une obligation s’est (un peu) répandue… Mais tout cela se heurte de plein fouet à ce qu’est l’école aujourd’hui, au rôle qu’on veut lui faire jouer et aux moyens qu’on y met, à sa fonction politique en quelque sorte.

En même temps que le discours se fait insistant, et même injonctif, sur l’inclusion des élèves handicapés, les inégalités des « bénéfices » de l’éducation ne cessent de s’accroitre par les choix politiques qui sont effectués : ségrégation sociale entre les établissements scolaires par la carte scolaire reproduisant la cartographie populationnelle et répartissant ainsi les élèves dans des ghettos de pauvres et des ghettos de riches, dont les chances de parcours scolaires ne sont pas identiques, mais aussi renforcement d’un enseignement privé élitiste et ségrégatif, des systèmes d’options et de parcours favorisant ceux qui maitrisent le système, etc. On en arrive même à des paradoxes étranges où l’on voit un établissement extrêmement élitiste (sur le plan social et sur le plan de la performance des apprentissages) clamer haut et fort que l’inclusion des élèves handicapés fait partie intégrante de son projet d’établissement. Comment est-ce concevable de pratique en même temps l’exclusion et l’inclusion ?

Plus insidieusement, la perspective inclusive se heurte aux finalités d’une école dont la fonction fut, et reste sélective, celle d’une répartition des élèves sur des parcours qui mèneront certains d’entre eux (dans des établissements qui disposeront de ressources) vers de « hautes » fonctions, laissant aux autres des miettes plus ou moins consistantes. Et ce n’est pas une méritocratie fantasmée qui remédie à la situation. Dans ces conditions de sélection des plus performants, les divers aménagements de l’école, des « plans inclinés pédagogiques » aux aménagements d’examens, ne peuvent que faire grise mine face au rouleau compresseur d’une école qui reproduit sans cesse des inégalités.

C’est pour cette raison que ce qui se présente aujourd’hui dans le système éducatif comme « école inclusive » n’est souvent qu’aménagement mineur, de surface, caution et excuse argumentative, ou leurre, c’est-à-dire des apparences de l’inclusion. Les mots ont pour fonction à la fois de nommer, de « créer » et de masquer des réalités (comme la publicité). Le qualificatif inclusif nomme aujourd’hui des réalités de ségrégation, de séparation, d’exclusion, faisant du concept « inclusion » une réalité éloignée des intentions initiales, et masquant la terrible réalité d’une société non inclusive.

Lire l'article


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire