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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 27 juin 2022

le passé de l'avenir des SESSAD

Le passé de l'avenir des SESSAD

« Les SESSAD d’aujourd’hui seraient-ils le prototype du soin de demain ? » interroge un ouvrage récent sur les SESSAD (T. VILTARD, le SESSAD un service d’éducation et de soins tourné vers l’avenir, érès, 2021). Bonne question effectivement ! Peut-être pas aussi nouvelle qu’elle n’en a l’air ! Il y a trente-cinq ans, je prenais la responsabilité d’un service qui se créait, qui n’avait pas encore le nom de SESSAD, mais que en préfigurait le fonctionnement. Avec cette même interrogation, ou plutôt cette même conviction que la question se posait déjà en ces termes. Oui déjà, en 1985, le tout établissement spécialisé était interrogé, et certains professionnels, dont je faisais partie, s’interrogeaient sur les modalités d’accompagnement d’enfants en situation de handicap à l’école, qui, elle, était encore bien éloignée de telles interrogations.

Les termes n’étaient certes pas les mêmes que ceux d’aujourd’hui, et à ce titre la question de l’ouvrage demeure pertinente. En effet, au milieu des années 1980, on ne parlait pas encore d’inclusion, encore moins de droits, mais timidement d’intégration. L’intégration avait comme postulat la capacité des enfants concernés à répondre aux normes de fonctionnement de l’école, à se conformer aux normes scolaires des « valides ». Ce qui compliquait naturellement les modalités d’intervention d’un SESSAD. Ainsi par exemple (expérience personnelle), avec des enfants ayant une déficience auditive, seuls les moins sourds, des « malentendants » le plus souvent, réunissant encore des conditions favorables, étaient susceptibles d’être intégrés. Si parfois cela concernait des jeunes plus sourds, souvent à la demande des familles, la condition impérative était qu’ils aient un certain niveau de performance et de maitrise de la langue orale, la langue des signes étant un marqueur d’impossibilité d’intégration. L’intégration posait encore le principe de l’existence de deux filières, celle de l’éducation spécialisée étant présente pour ceux qui ne pouvaient être « naturellement » intégrés. Les notions de droits, d’accessibilité, d’adaptation aux besoins particuliers étaient absents des référentiels professionnels et administratifs.

Cependant, ces dispositifs, expérimentant et innovant, anticipant les formes actuelles des SESSAD, ont mis en place des modalités de fonctionnement qu’on retrouve aujourd’hui, enrichies des nouveaux modèles conceptuels du handicap, de l’approche par les droits, des notions comme l’autodétermination ou la participation sociale, dans des processus qui caractérisent une transition inclusive. Autrement dit, à la question posée par l’ouvrage en 2021, il aurait pu déjà être répondu, en partie, déjà en 1985 : « oui les SESSAD sont les prototypes du soin (ou plutôt de l’accompagnement, si l’on veut sortir d’une problématique soumettant le handicap à des caractéristiques de santé) de demain. »

Que s’est-il passé pour que, 35 ans plus tard, la question se pose en des termes quasi identiques ? Les modèles de pensée et d’action ont changé. Le nombre de places en SESSAD a considérablement augmenté, sans que pour autant les places en établissement spécialisé aient diminué dans les mêmes proportions. L’argument d’une résistance au changement des établissements spécialisés ne suffit pas à expliquer la situation.

Pour que des enfants en situation de handicap puissent bénéficier d’un SESSAD dans le cadre d’une orientation ad hoc, la condition minimale est qu’ils soient présents, acceptés, qu’ils participent aux institutions de la vie ordinaire : l’école, les loisirs… Or ces institutions ordinaires sont encore extrêmement sélectives, résistantes à devenir inclusives, ancrées sur le modèle intégratif. Elles résistent à accueillir des enfants à besoins particuliers et à s’adapter à eux avec des moyens suffisants et pertinents pour réaliser un accompagnement de qualité. Les différents acteurs de l’école mettent des obstacles tant sur le plan pédagogique (« je ne suis pas formé·e ») que sur le plan administratif (le serpent de mer des inscriptions). Le passé des SESSAD a encore de l’avenir !

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