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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 17 février 2020

désinstitutionnalisation et inclusion

Désinstitutionnalisation et inclusion


Depuis quelques décennies déjà, le terme de désinstitutionnalisation fait florès, inquiétant bien souvent les professionnels et les gestionnaires d’établissements. Ainsi que le définit l’ONU, « le concept de désinstitutionnalisation est un processus qui prévoit le passage des milieux de vie institutionnels et autres structures ségrégationnistes à un système permettant une participation sociale des personnes handicapées, dans lequel les services sont fournis à l’échelle de la communauté selon la volonté et les préférences individuelles ». Elle désigne donc un processus qui consiste à apporter des services dans l’environnement ordinaire, et non plus à répondre aux besoins au sein des établissements.

Cette désinstitutionnalisation apparait légitime à bien des égards : la vie en institution n’est pas par définition la demande des personnes en situation de handicap ; de nombreux témoignages sont là pour nous rappeler que cette institutionnalisation est aussi synonyme d’absence d’accès aux droits fondamentaux, d’obstacles à l’autonomie et à l’autonomisation, de ségrégation, etc… Des moyens et dispositifs sont à disposition de la puissance publique pour impulser ces changements : les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), la conformité des attendus des évaluations avec les recommandations de bonnes pratiques professionnelles, les appels d’offre, les fléchages vers les services ou plate-formes de services, la nouvelle tarification à l’activité dans le cadre de Seraphin-PH. L’injonction à fermer progressivement et parfois rapidement les institutions est en effet forte.

Mais constate-t-on aussi, « la fermeture progressive des institutions spécialisées, réputées ségrégatives, débouche non sur l’inclusion mais plutôt sur de nouveaux processus d’exclusion à l’intérieur même du système, et/ou sur des stratégies de lutte contre cette ségrégation intérieure. » (M. KOHOUT-DIAZ, L’éducation inclusive, érès, 2018) L’inquiétude s’est manifestée de manière marquante dans la pétition « Urgence handicap : danger ! », qui met en avant la qualité qui existe dans les institutions, malgré toute la communication qui les dénigre, et l’absence de solutions satisfaisantes du milieu ordinaire. Les risques existent effectivement pour des enfants et des adultes en situation de handicap de se retrouver sans solutions d’accompagnement et avec des conditions d’accueil trop défavorables dans l’environnement ordinaire, et sans la protection nécessaire pour certains d’entre eux.

Et c’est bien sans doute là la vraie question. Le choix politique qui est fait est de piloter cette désinstitutionnalisation de manière autoritaire et autocentrée, en détricotant les institutions par les moyens publics, en transférant simplement leurs missions vers des services, et en comptant sur le milieu ordinaire pour trouver les réponses adéquates. Cette méthodologie, parfois brutale, peut générer des incompréhensions, des angoisses et des résistances des professionnels, et conduire à une moindre qualité de vie des personnes en situation de handicap se retrouvant démunis et vulnérables dans la société. Une autre méthodologie aurait pu consister à mettre des priorités sur l’inclusivisation et l’inclusivité de la société de façon à rendre inutiles, ou en partie inutiles, les institutions, en mettant les organisations au service de la participation sociale des personnes en situation de handicap. Cette approche exige évidemment des changements profonds dans la société. La pression au travail ne peut rester en l’état, l’école ne peut plus fonctionner sur un principe inégalitaire, le logement et les transports doivent être accessibles, etc.

A vouloir imposer la désinstitutionnalisation sans changement de paradigme sociétal, par injonctions organisationnelles, sans choix, volonté et courage politiques de changements sociaux, on ne peut aboutir qu’à une « inclusion » d’exclusion et de ségrégation, qui remplacerait les « prises en charge » institutionnelles par une augmentation de vulnérabilité faute de conditions d’accueil favorable et d’accompagnement suffisant.

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