Compensation et accessibilité
Compensation et accessibilité sont les deux notions
centrales de la loi du 11 février 2005, et des notions aujourd’hui familières.
A priori, il ne semble pas difficile de distinguer ces deux notions. De la compensation,
relèvent toutes les actions et tous les objets qui réduisent la distance entre
la personne qui a une déficience ou une incapacité et les normes établies de
l’environnement. Dans ce registre, on trouve autant les prothèses que les
rééducations nécessaires à l’usage d’un organe, ou encore les AESH
(Accompagnants des élèves en situation de handicap) à l’école. De
l’accessibilité dépendent tous les aménagements ou les changements opérés dans
l’environnement pour favoriser la participation des personnes, en tenant compte
de leurs différences : en relèvent les plans inclinés et les ascenseurs,
la traduction en langue des signes ou les sous-titrages, de même que
l’aménagement pédagogique effectué par un enseignant dans sa classe.
Quand on y regarde plus près, les choses ne sont pas aussi
simples. Et l’exemple de l’interprétariat en langue des signes est susceptible
de nous interroger. Lorsque l’interprétariat en langue des signes est institué,
on voit bien qu’il s’agit d’accessibilité : la vignette de l’interprète
sur l’écran de la télévision, l’interprète appelé lors d’une comparution en
justice ou dans un commissariat, l’interprète présent lors d’un meeting
politique pré-élections ou lors de conférences, etc. Dans ces situations,
l’organisme ou l’institution se rend accessible à des personnes sourdes en
usant d’un aménagement humain pour réduire ou enlever l’écart des modes de
communication avec les personnes concernées.
Mais dans d’autres circonstances, plus
« privées », la présence de l’interprète est considérée comme un
moyen de compensation : un rendez-vous avec le médecin traitant, avec le
banquier, ainsi que pour d’autres besoins personnels. Il s’agit bien là d’une
compensation, puisque ce besoin est reconnu et peut être financé par la PCH (prestation
de compensation du handicap).
C’est dans l’entre deux que les situations sont plus
ambigües. Ainsi en est-il de l’interprétariat en milieu scolaire, question bien
évidemment liée à la question du financement en termes de compensation et/ou
d’accessibilité. Le législateur a statué d’une certaine manière, puisqu’il a
exclu des domaines d’intervention des AESH l’interprétariat en langue des
signes pour accompagner les élèves sourds. S’agit-il alors d’une autre
compensation ? Dans ce cas, est-ce à l’Education nationale de trouver les
ressources pour mettre en place une autre catégorie de compensation, avec des
interprètes diplômés ? Ou alors, puisqu’il s’agit de compensation,
serait-ce au secteur médico-social de fournir les moyens de cette compensation
(comme c’est le cas aujourd’hui dans un grand nombre de situations) ?
S’il s’agit d’accessibilité, à qui revient-il de mettre les
moyens de cette accessibilité ? Aux collectivités locales (communes,
départements, régions), au même titre qu’elles mettent en place l’accessibilité
des bâtiments ou du mobilier ? A l’éducation nationale, qui se devrait de
mettre en place l’accessibilité pédagogique de la communication, comme elle met
en place des aménagements accessibles, dans les examens par exemple ?
Dans cet entre-deux, aujourd’hui tout le monde se renvoie la
balle, et les dispositifs qui se mettent en place sont bricolés en fonction des
situations locales, avec des différences extrêmement importantes en qualité et
en quantité des accompagnements des élèves sourds, quand ces incertitudes ne
nuisent pas de manière majeure à la scolarisation de ces élèves, faute de
moyens mis en place.
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