D'une bonne idée faire un piège : le PIAL
Les Pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL) ont
été évoqués pour la première fois à l’été 2018, et il est annoncé leur mise en
place de manière imminente. Ils ont pour objectifs de favoriser la prise en
charge par les enseignants ordinaires des élèves en situation de handicap dans
la perspective d’une école inclusive.
Annoncée de cette manière, quelle meilleure idée en effet
que ce type de dispositif, faisant passer le focus de la compensation vers
celui de l’organisation pédagogique, prônant et organisant la non
discrimination d’une catégorie d’élèves, la confiance accordée aux enseignants
dans leurs savoir-faire pour répondre au moins partiellement aux besoins et aux
difficultés d’apprentissage de ces élèves, l’engagement de toute la communauté
éducative dans le développement de l’école inclusive, la synergie de tous les
acteurs pour la réalisation d’un projet de scolarisation d’un élève ? Face
aux difficultés de la mise en place d’une école inclusive, voici donc apparemment
un nouveau dispositif ayant pour objectif une amélioration volontariste de la
prise en compte de la situation des élèves handicapés dans les établissements
scolaires.
Ainsi par exemple, le transfert, le déplacement de la
compensation vers l’organisation pédagogique se fait dans un contexte de
restriction de moyens humains générale à l’école : maintien des classes
avec des effectifs chargés (sauf en ce qui concerne les dédoublements des CP et
CE1 en Réseau d’Education Prioritaire), avec comme conséquence une charge de
travail disproportionnée des enseignants ; absence de formation des
enseignants ordinaires à la
différenciation et à l’accompagnement des élèves en situation de handicap,
ainsi qu’à l’assimilation des problématiques inclusives ; incertitudes sur
le nombres d’enseignants ressources (ces ex enseignants spécialisés affectés en
particulier aux ULIS) ; défiance de l’administration à l’égard des
enseignants dans une école de la confiance
(comme en témoignent les débats concernant le projet de loi sur l’école de la
confiance en début 2019) ; diminution des ressources professionnelles dans
les réseaux d’aide et dans les dispositifs Plus
de maitres que de classes).
Quant aux AESH (Accompagnants des élèves en situation de
handicap), se posent de nombreuses questions. Si l’on peut considérer que la
prise de responsabilité pédagogique des enseignants concernant des élèves en
situation de handicap rendrait obsolètes certaines missions des AESH,
confirmant le déplacement de la focalisation de la compensation vers
l’organisation pédagogique, il ne peut en être de même immédiatement de
l’ensemble des accompagnements, d’autant que la formation de ces enseignants ne
suit pas. Par un tour de passe-passe, l’annonce de milliers de créations de
postes d’AESH s’est avérée en fait n’être qu’un transfert de postes des anciens
AVS ou EVS vers la fonction et le statut, encore incertain, d’AESH.
Au terme de ce processus alliant annonces généreuses
d’inclusion et détérioration des moyens sur le terrain, il est à craindre que
l’inclusion n’apparaisse comme un repoussoir, un pensum, un moyen pour faire
des économies, bref un piège à bonne idée, c’est-à-dire en définitive une
mauvaise idée.
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