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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

vendredi 8 mars 2019

besoins, évaluation et évaluationnite

Besoins, évaluation et évaluationnite


Bien souvent, les réponses apportées aux usagers du secteur médico-social tiennent davantage à l’existence des réponses en tant que ressources professionnelles et institutionnelles que de l’analyse « objective » (l’objectivité ne pouvant être absolue) des besoins des personnes. La présence d’un musico-thérapeute ou d’un artiste dans un Institut spécialisé pour enfants ayant une déficience intellectuelle « produit » un besoin d’expression musicale ou artistique pour ces enfants. La présence d’enseignants spécialisés dans un institut spécialisé pour jeunes sourds « produit » un besoin de pédagogie spécialisée pour les jeunes sourds, alors que là où ces enseignants n’existent pas, la réponse aux besoins fait appel à des interfaces ou des interprètes en langue des signes. La multiplicité et la diversité des réponses professionnelles crée la multiplicité et la diversité des besoins.

Depuis longtemps, et pour différentes raisons (aussi bien philosophiques que politiques ou économiques), l’évaluation des besoins est une préoccupation « politique ». Il s’agit d’abord de tenter de répondre aux véritables besoins des personnes et de ne pas se contenter des réponses existantes, d’interroger leur utilité sociale, et d’apporte éventuellement des réponses aux besoins identifiés au regard des personnes elles-mêmes et de la préoccupation des politiques publiques. Il s’agit aussi de « rationaliser les moyens ».

De nombreux outils ont été mis en place à différents niveaux d’action auprès des personnes en situation de handicap : CIF, MAHVIE, GEVA, GEVASco, SERAFIN-PH, pour n’en nommer que quelques-uns. Une fois appropriés, ces outils d’évaluation sont susceptibles effectivement de permettre l’ajustement des prestations (réponses) aux besoins des personnes, et ainsi se présenter comme des évaluations « justes ».

Mais ces modalités d’évaluation courent un risque, celui de « l’évaluationnite ». A vouloir tout balayer des déficiences/incapacités/désavantages/environnements/habitudes de vie, et ceci dans tous les aspects de la vie d’une personne étiquetée par sa nomenclature (son statut de handicapé), le risque est de ne voir la personne qu’au travers des performances qu’elle réaliser ou qu’elle ne réalise pas dans les différentes rubriques de sa nomenclature. Et les missions des professionnels du secteur étant d’améliorer les aspects déficitaires ou en écart à la norme, le risque est de ne voir la personne en situation de handicap qu’à travers ses manques, généralisés à l’ensemble de ses habitudes de vie.

On a dit parfois des psychologues qu’ils ne voient le monde qu’à travers les pathologies qu’ils rencontrent. Le risque ici est de ne voir les personnes en situation de handicap qu’à travers la « face noire » de leurs incapacités mises en évidence dans les évaluations. Et de revenir finalement au point de départ de réponses déterminées par les professionnels et non par les besoins.

Le danger est particulièrement présent lorsque l’évaluation ne se contente pas de déterminer les besoins d’une personne, à partir de la manière dont celle-ci évalue elle-même la réalisation de ses habitudes de vie, afin de déterminer les aides, accompagnements et aménagements nécessaires à une meilleure réalisation de sa participation sociale. Il est particulièrement présent lorsque cette évaluation met en regard ces besoins et les réponses souhaitées avec les ressources disponibles. Celles-ci risquent de faire basculer l’évaluation du côté d’une évaluation technocratique qui fonctionne en boucle.

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