Faut-il un certificat médical pour acheter une bicyclette ?
Sauf cas exceptionnels peut-être, lorsqu’une personne a
besoin, pour se déplacer (pour son travail, ses loisirs, sa vie quotidienne),
d’une bicyclette, et s’il en a les moyens, il va l’acheter. Lorsqu’une personne
qui a une déficience motrice, a besoin, pour les mêmes raisons, d’un fauteuil
roulant, indépendamment des raisons économiques, il devra obtenir un certificat
médical attestant de sa déficience pour que la société puisse prendre en compte
son besoin (par tout ou partie du financement).
On a beau afficher notre préoccupation de prendre en compte la
situation de ces personnes d’un point de vue systémique ou éco-systémique, rien
n’y fait : on est toujours renvoyé à une approche qui met au premier plan
la déficience et les caractéristiques personnelles dans la restriction de
participation sociale des personnes handicapées.
Bien évidemment, il y de multiples raisons de maintenir ce
contrôle médical. Le guide-barême pour l’évaluation des déficiences et
incapacités des personnes handicapées du code de l’action sociale et des
familles constitue la seule porte d’entrée d’accès aux droits, même si cette
porte est complétée par d’autres indicateurs. En termes d’accompagnements, la
logique conséquente conduit à mettre l’accent sur des réponses thérapeutiques
(réadaptation, soins), à ancrer les interventions professionnelles dans un
secteur médico-social qui se sanitarise fortement depuis son organisation dans
les Agences régionales de santé.
Tout concourt en définitive à instituer que la personne
handicapée est encore définie par ses déficiences et ses incapacités. S’il
fallait déterminer, puisque cette détermination engage la société entière dans
la prise en charge financière, la hauteur des besoins d’une personne handicapée
qui a besoin de se déplacer, il me semble que, s’agissant ici d’une habitude de
vie, d’une activité « sociale », un travailleur social serait le plus
à même d’en juger avec la personne concernée. Et dans cette approche, il
resterait à savoir s’il faut encore un certificat médical.
L’approche des interventions (prise en charge, réadaptation,
accompagnement) auprès personnes handicapées naquit et fut développée à partir
de problématiques de traitement et de soin, auxquelles se sont rajoutées
progressivement des problématiques éducatives et sociales. Il serait peut-être
temps de renverser le sens des approches. Et de voir les personnes handicapées
d’abord comme sujets de droit (ce que préconise la convention onusienne
relative aux droits des personnes handicapées) et non objets de soins. Non pas
que les soins, au sens large du terme, soient à bannir, mais qu’ils soient au
service des la maximisation des activités de participation sociale, et en
fonction des projets des ces personnes.
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