1 élève en situation de handicap = 1 ?
Parfois il est égal à 0. Lorsque l’établissement scolaire
refuse de l’inscrire, ou fait une inscription inactive, alors même qu’il est
présent au collège dans un dispositif spécifique d’une unité d’enseignement
d’un établissement médico-social. Aux yeux de l’administration scolaire, et
au-delà aux yeux des acteurs scolaires, il est hors jeu, hors liste d’élèves,
oublié, comme s’il était en visite dans l’établissement alors qu’il y est
présent au quotidien. En principe les derniers textes réglementaires (2016)
lèveront cette hypothèque afin que les élèves, y compris ceux qui bénéficient
d’un service ou d’un établissement médico-social, puissent prétendre enfin à
l’accès à leurs droits à « part entière ».
Mais paradoxalement, parfois le cours de l’élève en
situation de handicap peut être plus élevé : là il est égal à 2, voire 3
élèves ordinaires.
Cela commence par les nombres préconisés pour les
dispositifs collectifs (classes) : avant que cela ne soit des dispositifs
ouverts pour favoriser l’inclusion, les classes fermées de type CLIS voyaient
leur nombre limité à 12. Comme si l’on ne pouvait faire la classe à plus de
douze élèves handicapés réunis, là où
l’on était censé pouvoir faire la classe à 25 ou trente élèves « ordinaires »,
même lorsque cet ordinaire-là comporte des élèves difficilement gérables ou en
difficultés d’apprentissage, voire en échec scolaire. Et que dire de certains
dispositifs de classes des établissements médico-sociaux (en particulier dans les
établissements pour jeunes sourds ou jeunes aveugles, où il n’est pas rare de
voir des groupes classes inférieurs à 6). Dans ces différentes situations, la
valeur marchande d’un élève en situation de handicap est nettement supérieure à
1 !
On l’a souvent vu aussi lorsqu’il s’agissait de négocier la
présence d’élèves en situation de handicap dans les classes de l’Education
nationale. Là, pour les différents acteurs, l’élève en situation de handicap
devrait compter pour plusieurs élèves « ordinaires ». Dans mes différentes
expériences professionnelles, j’ai entendu jusqu’à : « 1 élève sourd
= 5 élèves entendants ». Alors même que parfois, ces élèves sourds
n’avaient pas de problèmes majeurs d’apprentissage scolaire (en dehors de la
maitrise de la langue écrite) et qu’ils pouvaient bénéficier d’une
interprétation en langue des signes tout au long des cours.
En dehors des effets pervers et délétères que ce genre de
comptage produit pour les élèves en question, il est à remarquer que la valeur
des élèves en situation de handicap croît lorsqu’il s’agit d’une charge
(organisation d’une classe, participation aux classes de l’établissement
scolaire) et diminue lorsqu’il s’agit de droits (inscription dans
l’établissement scolaires). Cette situation bien évidemment ne fait que
contribuer à la reproduction de la ségrégation et de la discrimination dont
font l’objet les élèves en situation de handicap dans les établissements
scolaires.
Considérer ces élèves « à part entière » requiert
d’établir l’équation : 1 élève en situation de handicap = 1 élève non
handicapé ; et de doter ces élèves bien évidemment des moyens
d’accessibilité et de compensation nécessaires.
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