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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 22 janvier 2024

troubles et tolérance aux différences

Troubles et tolérance aux différences

 La croissance, qui semble sans fin, de diagnostics de troubles neuropsychologiques ou neurodéveloppementaux de plus en plus diversifiés favorise-t-elle la prise en compte, dans le quotidien de la vie familiale et de la classe, des différences individuelles ainsi déclarées et mises en avant ? Il semble raisonnable de le penser, en fonction du principe selon lequel lorsque l’on connait un phénomène, on est en mesure de le traiter et d’y répondre. Mais ce principe lui-même a-t-il valeur universelle ? Des exemples invalident néanmoins ce principe : le diagnostic de trouble auditif conduit bien des professionnels à un traitement de réhabilitation de la langue orale, en ignorant de ce fait les différences linguistiques et culturelles qui pourraient advenir. Le diagnostic ne dit pas quoi faire. Il est par conséquent pertinent de s’interroger, dans le cas de ces troubles aujourd’hui si fréquents, sur la logique causale entre diagnostic et adaptation à la différence.

Certes, un diagnostic permet de mettre un nom sur des difficultés ou des inadaptations sinon inexplicables, et ainsi de sortir, pour certaines personnes, de l’incompréhension, de la culpabilité, de la dévalorisation, de la souffrance…, et de rebondir sur de nouvelles perspectives de vie. Des témoignages de personnes autistes le confirment par exemple. Mais faut-il que l’on soit si intolérants et non inclusifs pour que seul un diagnostic médical permette à des personnes ayant ces caractéristiques de ne pas sombrer dans l’échec et le rejet, et de se reconnaitre ?Faut-il que la société, et l’école, soit si intolérante et non inclusive pour qu’un étiquetage médical soit seul censé faire reconnaitre des différences humaines ? Faut-il que l’on soit si intolérant pour que des enfants en difficultés, qui ne se comportent pas comme la majorité, doivent devenir des enfants handicapés ?

Incontestablement, l’étiquetage de ces élèves dans la catégorie et l’étiquette « cancres » n’était pas appropriée : les « paresseux », les « tête en l’air », les « incapables de se concentrer », les « qui écrivent comme un cochon », ceux qui « ne savent pas écouter », et autres jugements d’incapacités ne doivent plus, et ne peuvent plus être de mise à partir d’un autre étiquetage. Mais celui-ci est-il pour autant pertinent ? Il institue en effet une médicalisation, une pathologisation de différences individuelles. Une attitude, un comportement, une manière de faire ou d’être deviennent des pathologies dès lors qu’ils ne correspondent pas à ce qui est attendu de l’environnement (l’école) dans lequel se trouvent les élèves concernés, ce qui est attendu correspondant aux normes moyennes (le « normal ») et aux injonctions institutionnelles. La pathologie n’est pas prise en considération dans ce qu’elle produit dans l’interaction entre un enfant et le système institutionnel (l’école) et dans les difficultés ainsi rencontrées. La pathologie est seulement considérée dans la nature du fonctionnement individuel de l’enfant. Le trouble n’est pas dans l’interaction entre une personne et son environnement, mais dans la personne.

Qu’il y ait une dimension neurogénétique dans nombre de ces troubles (nul ne peut contester ce fait aujourd’hui) ne devrait pourtant pas exclure de considérer d’autres facteurs, en particulier dans les interactions sociales, pouvant produire des difficultés, sans devoir mettre systématiquement les enfants concernés dans une catégorie, sous une étiquette de trouble. Lorsque les résultats, les compétences, les performances ne rentrent pas dans la norme, faut-il considérer qu’il s’agit par nature de troubles, ou bien d’une manifestation de la diversité des développements, des comportements, des attitudes, des manières et modalités d’apprendre, diversité ainsi niée par l’affectation d’un trouble, le diagnostic d’une pathologie individuelle, et un parcours d’une certaine manière entravé, même s’il est aidé ?

La croissance de la reconnaissance de ces troubles n’est peut-être que le signe de la croissance de l’intolérance aux différences et à l’acceptation de la diversité humaine.

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