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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 2 mai 2022

une transition inclusive ?

Une transition inclusive ?

Un nouveau paradigme s’est progressivement installé dans nos habitudes sociales, celui de l’inclusion, et en particulier celui de l’inclusion des personnes en situation de handicap. Nombre d’acteurs se sont empressés d’investir et de coloniser le terme, à défaut parfois de pouvoir en conceptualiser toutes les implications. On a ainsi obtenu des « objets » inclusifs, des dispositifs inclusifs de logement, de scolarisation, de tourisme, de transport, de soins ou de vie citoyenne, qui se voient qualifier d’inclusifs pour décrire des fonctionnements qui, au moins au départ, ressemblent furieusement aux fonctionnements qui les précédaient, alors qualifiés d’intégratifs ou de spécialisés. L’étiquette ne modifiait pas toujours les pratiques. La société restait non inclusive, mais sous l’appellation inclusive !

A l’école, les CLIS sont passées de l’appellation « intégration scolaire » à « inclusion scolaire » avant d’être nommées Unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS). Les pratiques n’ont pourtant que peu évolué, et l’esprit « spécialisé » demeure. L’école d’aujourd’hui, revendiquée comme inclusive par les pouvoirs publics, se manifeste de la même manière que l’école qui n’était pas déclarée inclusive, par le refus de scolarisation d’enfants en situation de handicap, par l’absence d’aménagements raisonnables et d’accessibilité, l’indigence des aides humaines et le maintien d’un secteur spécialisé ségrégatif.

Le réel s’impose donc pour interroger l’affirmation du caractère inclusif de phénomènes qui ne le sont pas vraiment. Le terme transition inclusive apparait fort à propos pour relativiser la situation, et sans doute mieux décrire le réel. En effet, parler de transition inclusive permet de signaler qu’il s’agit d’une dynamique, d’une évolution, d’une étape allant vers les caractéristiques d’une inclusion, entre un moment passé où l’idée inclusive n’existait pas ou était embryonnaire, et un moment futur, un horizon, une perspective où les institutions de la société accueilleront les différences comme en faisant partie de plein droit et à égalité. Le terme désigne en quelque sorte un point d’équilibre orienté vers une avancée inclusive.

Selon cette perspective, il importe toutefois de maintenir une certaine vigilance, tant ce moment reste instable et court le risque de perdurer. Passer à une perspective de transition appelle à approfondir et à aller plus loin dans la mise en place de l’accès à la participation sociale, aux droits et à l’autodétermination des personnes concernées. Il ne faut pas attendre que le concept d’inclusion ne désigne en l’occurrence un état de fonctionnement, mais plutôt un idéal, une valeur, un horizon permettant de mettre des balises  de fonctionnement dans ce qu’il faudrait modifier de la situation instable d’aujourd’hui. La notion de transition inclusive est à ce titre une description raisonnable et un outil opérationnel de changement.

Mais elle peut aussi porter une autre signification. En effet, au titre d’une qualification « transition inclusive », toute opération, situation ou changement peut en être attesté ; et la situation actuelle se justifierait dans son fonctionnement, même extrêmement insatisfaisant, au nom de la transition inclusive. Ainsi malgré les nombreuses impossibilités de scolarisation des élèves en situation de handicap, le manque d’aide humaines, les obstacles administratifs aux inscriptions, l’absence de formation, etc. l’école peut-elle être déclarée comme étant satisfaisante quant à l’inclusion. Ainsi encore, la réduction à 20% de logements accessibles avec la loi ELAN se manifeste-t-elle comme un élément de transition inclusive, là où la loi de 2005 était bien plus ambitieuse.

Comme souvent dans les phénomènes sociaux, le langage et les mots employés ont plusieurs sens, ou plusieurs interprétations en fonction des choix politiques, idéologiques ou éthiques de celui qui tient le propos.

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