A quoi s'oppose l'inclusion ?
On tente de définir la plupart du temps la notion
d’inclusion en lui attribuant des contenus positifs et constructifs : en
quoi consiste-t-elle, quelles en peuvent être ses manifestions ? Une autre
manière de la définir est de le faire par contraste, c’est-à-dire en cherchant
quels sont ses opposés, ses contraires. En s’interrogeant sur cette question,
on trouve en réalité deux oppositions : l’inclusion est d’une part le
contraire de l’exclusion, d’autre part le contraire de l’intégration.
L’exclusion serait dans cette configuration le contraire,
par antonymie, de l’inclusion. Elle se manifesterait par des caractéristiques
de non participation sociale, de désaffiliation, de rejet aux marges de la
société, d’ostracisme et de disqualification sociale, etc., dans la
« misère du monde » (Bourdieu et al., 1993). Mais l’inclusion a aussi
pour contraire l’intégration, dans la mesure où celle-ci a été pensée et
organisée sous les auspices de l’assimilation.
Dans les deux cas, il y a instauration de limites qui
distingue les « eux » et « nous ». Barrières fixes et
immuables en ce qui concerne l’exclusion, barrières qu’il s’agit de franchir
dans la définition de l’intégration / assimilation. Dans cette dernière
configuration, s’instaure ainsi, écrit Y. Pillant (Les cahiers de l’actif, mars
2016) « un double processus : d’un
côté une catégorisation discriminante de ce qui parait différent, de l’autre un
renforcement du semblable présumé capable de résorber les différences, d’assimiler. »
Et poursuit-il : « La logique
intégrative est centrée sur l’individu différent eu égard à un ensemble de
normes envisagées comme partagées par le plus grand nombre. Il s’agit alors
d’aider cet individu à s’adapter aux normes et valeurs dominantes de la
société. Dans ce cadre, celui qui veut s’intégrer a un effort à faire ; la
participation à la société qui accueille se mérité. »
Le passage par les contraires permet en retour d’interroger
les contenus de l’inclusion. L’intégration pose le principe de la différence
justifiant de la mise en place d’une limite qu’il s’agit de franchir ou de
déplacer. L’inclusion au contraire pose le principe de l’absence de cette
limite : les différences sont des caractéristiques individuelles sur un
continuum (des anomalies aurait dit G Canguilhem) de similitudes qui ne
constituent aucunement des normes.
L’intégration définit un « nous » avec des normes
hors desquelles il y a des différences à réduire, à supprimer, de telle manière
que l’individu qui n’est pas dans les normes se les approprie ou les rejoigne.
L’inclusion part du principe que le milieu (inclusif) se construit avec les
personnes qui y sont présentes, quelles que soient leurs caractéristiques.
Une classe A sans élève handicapé se construit comme milieu
A, une classe B avec un ou des élèves handicapés se construit comme milieu B.
Dans la pensée intégrative, il importe de définir préalablement ce qu’est la
classe A, son identité en quelque sorte, à laquelle ne peuvent pas appartenir
des élèves qui ne possèdent pas cette identité, sauf à s’intégrer en rejoignant
cette identité. Dans la pensée inclusive, il n’y a nul besoin de définir
préalablement ce qu’est la classe B, puisque qu’elle va se définir avec les
élèves qui en feront partie, à partir des relations qui vont s’y établir entre
tous les élèves, quelles que soient leurs caractéristiques et leurs
singularités.
« Personne n’est plus autre qu’un autre »
écrit aussi Y. Pillant : Dans ces conditions, chacun est en droit de
prétendre à être présent dans une classe inclusive.
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