L'ULIS, inclusion et exclusion
L’ULIS est une unité localisée pour l’inclusion scolaire.
Elle a remplacé il y a quelques années déjà les CLIS (Classes d’intégration
scolaire) et les UPI (Unités pédagogiques d’intégration). Avec l’emploi de cette
terminologie, ULIS, on aurait pu s’attendre à trouver dans le titre de cet
article le seul terme d’inclusion. Si j’ai choisi cependant également le terme
exclusion, c’est que le dispositif en question relève à la fois de l’inclusion
et à la fois de l’exclusion.
Bien sûr l’ULIS permet à des élèves, autrefois hors de
l’école, dans des institutions médico-sociales qui ne se préoccupaient pas
toujours de les scolariser, d’être présents dans les établissements scolaires.
Il ne faut toutefois pas oublier que nombreux sont encore les élèves qui sont
dans ces institutions médico-sociales, qui n’ont qu’une possibilité partielle
(voire nulle pour certains d’entre eux) d’être scolarisés dans les
établissements scolaires à travers les dispositifs dits externalisés qui ont
fait l’objet d’une politique injonctive dans la période récente. L’on peut
considérer que les dispositifs (ULIS, UPI, CLIS) ont installé des enfants en
situation de handicap dans l’école en tant qu’espace physique regroupant des
enfants pour des activités scolaires.
Cela veut-il dire qu’ils ont de ce fait inclus ? Même si l’on n’est plus dans des espaces clos à l’intérieur d’un établissement scolaire qui caractérisaient les CLIS et les UPI, les ULIS se voulant des dispositifs favorisant l’inclusion dans les différentes classes de l’établissement scolaire, les élèves qui en relèvent ont quand même des statuts particuliers. Ils sont d’abord rattachés administrativement à ce dispositif particulier, avec des inscriptions de plein droit tout à fait aléatoires (ils ne sont pas inscrits par exemple en 6ième C, mais en ULIS, même s’ils ont inclus significativement en 6ième C). Ils naviguent du local de leur dispositif aux salles de classes.
Ils sont dans une espèce d’entre deux identitaire et
structurel, dans des espaces morcelés, dans des dispositifs dispersés. Ils ne
sont certes pas exclus de l’école, mais ils ne sont pas inclus non plus. Il
s’agirait davantage de ce que Pierre Bourdieu avait qualifié d’exclusion de
l’intérieur. On pourrait même considérer que l’ULIS ne constitue pas un
dispositif pour l’inclusion, mais essentiellement un dispositif ou un
lieu d’exclusion de la classe ordinaire.
Cette configuration d’inclusion/exclusion a des conséquences
sur les élèves, ceux en situation de handicap et les autres. Pour ces derniers,
l’ULIS constitue l’institutionnalisation de la catégorisation d’une partie des
élèves comme étant différents, à part, pas comme eux, spéciaux, à garder à
distance. Quant aux élèves rattachés à l’ULIS, outre l’incertitude identitaire
instituée, ils ne sont pas toujours en mesure d’établir les relations sociales
nécessaires et attendues, mis à distance par leur participation épisodique à la
classe et leur statut particulier, et se repliant en termes de sociabilité sur
les pairs de l’ULIS.
Elle a aussi des conséquences sur les représentations des
enseignants : les élèves en situation de handicap restent à part, tolérés
dans leurs classes sous conditions et à dose homéopathique, objet, avec les
meilleures intentions, d’une individualisation qui va les isoler du groupe
classe.
L’ULIS, malgré sa terminologie inclusive reste encore, en
bien des aspects, référencée au modèle de l’intégration, c’est-à-dire incluant
partiellement, mais restant obstinément excluante.
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