La différence n'est pas un handicap
Nous sommes tous différents, et semblables en tant qu’humains. Nous avons tous et chacun des particularités qui nous sont propres : des habitudes de vie différentes, des corps différents, des aptitudes différentes, des environnements différents. La diversité humaine est une réalité intangible. Certaines de ces différences sont catégorisées pour réunir un certain nombre de personnes autour d’une ou plusieurs caractéristiques partagées, qui vont ainsi constituer le point commun, mis en avant en tant que Différence. La frontière pourra par conséquent être établie entre les différents et les non différents : c’est le cas pour les personnes qui présentent des maladies, des déficiences, des incapacités, des troubles. Elles sont catégorisées « personnes handicapées ». Dans ce processus d’appropriation de la différence (JE suis différent dans la diversité / IELS sont différents dans le handicap), la diversité disparait au profit de l’attribution du qualificatif à un groupe de personnes qui partagent les mêmes caractéristiques : « dans ma classe, j’ai au moins trois enfants différents ! » Pourquoi et en quoi ceux-ci seraient-ils différents des dix-huit autres, qui eux seraient par conséquent non différents, « normaux », les différents devenant « a-normaux ».
C’est ainsi que la
différence se transforme, dans les représentations, en handicap. Mais pour
quelle raison une différence serait-elle en soi une situation de
handicap ? Dans une société où les rapports de domination constituent la
trame du fonctionnement social, nombre de différences constituent des obstacles
à une véritable égalité citoyenne : le genre, la couleur de peau,
l’origine, les ressources, le niveau d’études, le fonctionnement corporel et
psychique… Elles ne sont pas considérées, sauf la dernière, comme des
situations de handicap. Elles n’en constituent pas moins des obstacles à
l’égalité des citoyens, ou plutôt c’est l’environnement social, qui fonctionne
en hiérarchisant ce type de différences qui produit de l’inégalité entre les
personnes et les catégories. Quant aux différences corporelles ou d’aptitudes
(intellectuelles, langagières, comportementales, physiques…), elles sont
nommées et définies comme « handicaps », ou comme produisant des
situations de handicap. Mais de telles différences, et en particulier celle qui
caractériserait un groupe particulier de personnes dans la catégorie handicap,
ne sont pas en soi des situations de handicap. Elles ne le deviennent que dès
lors que rien n’est fait pour rendre cette différence normale dans le
fonctionnement social, comme une marque ordinaire de la diversité. Et dès lors
que la différence peut exister, s’exprimer, s’exercer dans le monde de tous.
Lever des
obstacles dans l’environnement, réduire les difficultés de réalisation des
activités de la vie quotidienne et des rôles sociaux, ce n’est pas réduire la
diversité. Chacun reste différent de l’autre, évitant l’assignation à une
identité qui donnerait un statut. Il n’y aurait pas les « normaux »
et les « différents ». Là où la notion de différence fait en certains
cas force de pathologie (en raison des particularités liés à un marquage
biologique), il y aurait lieu de considérer que cette particularité, quelles
que soient ses caractéristiques, est une condition ou un facteur de
fonctionnement ; qu’elle ne devrait pas être ignorée dans l’organisation
de l’environnement pour qu’elle apparaisse normale. On pourrait reprendre ici
la réflexion de G Canguilhen, pour qui il y a lieu de considérer
« l’anormal comme un autre normal »
Il faudrait donc
cesser de considérer qu’une différence (celle qui affecte les personnes
handicapées) est un handicap. Si ces personnes se trouvent en situation de
handicap, c’est que la société les met à la marge de l’humanité, tant sur le
plan matériel que symbolique, considérant ces différences comme des pathologies
à guérir ou normer, comme des conditions d’infériorité. Les différences des
personnes sourdes ou des personnes autistes ne sont caractérisées comme
handicap que parce que la société ne fait rien (ou si peu) pour faire exister
ces différences.
Merci!
RépondreSupprimerVous avez mis en mots mes pensées désordonnées.
Mon fils autiste n’est handicapé que dans la mesure où l’autre ne s’adapte pas à ses différences (de langage, d’intérêts, etc) et où la société ne perçoit comme normal que la productivité ou la possibilité de productivité future d’un individu.
Bref c’est moins bien dit mais je partage votre perception.