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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

mardi 10 septembre 2024

l'école inclusive comme réalité alternative

L'école inclusive comme réalité alternative

 Le langage désigne, nomme et qualifie le réel. Mais il sert aussi à masquer et oblitérer le réel, en créant une réalité alternative. George Orwell a magnifiquement illustré ce phénomène dans son roman 1984 (publié en 1949), avec ce résumé de communication dans la formule, mot d’ordre et slogan : « La liberté, c’est l’esclavage ! ». De manière similaire, le discours politique public désigne une situation, où l’exclusion de l’école (refus, défaut d’adaptation, stigmatisation, ségrégation) de nombre d’enfants handicapés est monnaie courante, sous les termes inclusion ou école inclusive. Il crée ainsi une réalité alternative d’une école inclusive, à l’exact opposé de ce qui se passe véritablement : l’inclusion, c’est l’exclusion !

Mais le langage politique public n’a pas d’autre solution que de créer par le langage une réalité alternative. En effet, la politique éducative développée depuis maintenant de nombreuses années, à quelques exceptions près, est une politique qui va à l’encontre des pratiques inclusives, dont la dernière illustration se trouve dans les économies de moyens qui l’affecte afin de préserver l’avenir budgétaire du pays. C’est l’ensemble du système qui fonctionne de manière non inclusive, concernant l’ensemble de la population scolarisée, et pas seulement concernant les enfants en situation de handicap.

La ségrégation choisie (avec le développement favorisé de l’enseignement privé, ou la maitrise de l’orientation et des filières) ou géographique (sur les cartes scolaires de l’habitat de catégories d’habitants et de populations) instaure des établissements scolaires de nature différente, des établissements de réussite et des établissements de l’échec relativement aux normes exigées. Les moyens mis en œuvre accentuent ces différences, comme l’ont mis en exergue les « maladresses » d’une éphémère ministre de l’Education nationale : les moyens et les ressources ne manquent pas pour les établissements privilégiés (ressources financées et investissements, absences systématiquement remplacées) quand des établissements « ordinaires » ou de zones défavorisées voient des fuites d’eau dans les plafonds et attendent en vain, pendant des semaines ou des mois, des remplaçants. Une école inclusive, c’est-à-dire une école qui accueille tous les enfants avec la même qualité et la même volonté de réussite, ne pourrait souffrir une telle situation. C’est pourtant cette situation qui est qualifiée par le discours politique d’école inclusive, présentant celle-ci comme une réalité alternative de l’égalité des chances et des conditions de scolarité.

Par ailleurs, cette réalité alternative est faite d’une autre manipulation. En ne parlant d’inclusion que pour les seuls enfants handicapés, le discours bannit la nature même et le principe d’une éducation inclusive. Il fait croire que l’école se préoccupe des élèves qui rencontrent des difficultés, mais en ne visant que ceux qui sont objectivement ciblés comme rencontrant des obstacles en raison de leurs caractéristiques physiques ou psychiques, et dont la préoccupation politique ne peut se dispenser. En faisant mine de s’occuper des enfants handicapés, la politique éducative feint une école inclusive pour tous. Les insuffisances manifestes et les barrières mises à la scolarisation de tous, et partant des enfants en situation de handicap, disparaissent derrière l’utilisation de la qualification inclusive, et masquent l’indigence et les mesures discriminatoires envers diverses populations d’élèves.

A lire et entendre le discours politique dominant, on serait déjà dans une école inclusive, quand les expériences scolaires des élèves en situation de handicap sont celles de l’exclusion, de la discrimination, de la ségrégation. C’est là le propre d’une réalité alternative promue dans le discours, qui attribue à tel ou tel terme un sens manifestement éloigné du monde vécu, afin de doter celui-ci d’une signification qui le présente favorablement. En changeant le sens des mots, en masquant le réel et en créant une réalité alternative.

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mardi 3 septembre 2024

surtout, ne pas former au handicap !

Surtout, ne pas former au handicap !

Il est pour le moins paradoxal, sinon provocateur, d’adresser cette apostrophe dans un moment où, pour favoriser l’école inclusive, tout le monde s’accorde à affirmer la nécessité d’une formation des enseignants et autres professionnels des équipes éducatives. Et pourtant, la question se pose, dès lors qu’on s’interroge sur la nature et les contenus de la formation dont il serait question. Si en effet l’approche culturelle du handicap est celle d’une conception individuelle et biomédicale, et que c’est cette approche qui est transmise dans la formation, celle-ci risque d’avoir des effets contre productifs, et contraires à l’idée même d’inclusion. Affirmer (et transmettre) que le handicap est dû aux caractéristiques individuelles de la personne (maladies, troubles, déficiences, incapacités, limitations…), c’est affirmer la responsabilité de la personne dans les situations qu’elle vit. « Pas de bras, pas de chocolat », disait l’autre.