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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

vendredi 23 août 2024

normes, handicap et validisme

Normes, handicap et validisme

Dans une société conçue par et pour les personnes considérées comme valides, on demande généralement aux personnes handicapées d’organiser leur vie et leur comportement autour de ce dont ils sont « dépossédés », autour de ce qui est considéré comme la norme humaine en vigueur, autour de ce qui les fait considérer comme non valides.

Cela est particulièrement visible dans les situations vécues par les personnes sourdes (les Sourds). Malgré une reconnaissance, récente, de la langue des signes, tout est fait, dans les dispositifs et les discours sociétaux, pour que les enfants qui naissent sourds soient « normés » en enfants entendants ou pseudo-entendants. Le texte sociétal, appuyé par des textes réglementaires (législatifs, recommandations…) affirme le caractère pathologique de la condition sourde et organise dès la naissance des parcours réparateurs pour « restituer cet enfant au monde » : dépistage systématique à J+2 et diagnostic précoce, systématisation de l’implantation cochléaire précoce, incitation à l’utilisation de la langue orale (avec aujourd’hui quelques compromis en faveur de la langue des signes), dispositifs de scolarisation non bilingues (de nombreux dispositifs s’affichant bilingues ne le sont que très imparfaitement ou par défaut), des inclusions, ou plutôt des intégrations conçues sur un mode individuel et normatif, etc. Tout est fait pour que l’enfant sourd se développe comme enfant entendant, gage d’une normalité admise et souhaitée. Tous les obstacles sont mis pour qu’il ne puisse construire une identité sourde.

Si le cas des personnes sourdes a mis en évidence les contradictions fondamentales entre le principe d’égalité des droits (et de citoyenneté) par reconnaissance d’une identité et une approche médicale individuelle réparatrice et normative, elles ne sont plus les seules parmi les personnes dites handicapées à se prévaloir d’une « condition handicapée » qu’il y a lieu de prendre en compte dans le registre de la diversité humaine, et non comme pathologie à faire disparaitre. Un certain nombre de personnes autistes le revendiquent fortement, leur fonctionnement cognitif, relationnel… étant une marque de la diversité humaine, qu’il ne s’agit pas de supprimer, mais de respecter, avec lequel il faut faire. S’il n’y a pas dans ces situations « dépossession » (comme l’audition chez les personnes sourdes), il leur est demandé de se conformer à des normes sociales ou cognitives auxquelles ces personnes ne peuvent pas souscrire. Elles souscrivent pourtant à des normes, qui peuvent être autres, et qui constituent leur être propre, leur « culture ». Au-delà des personnes sourdes ou autistes, pour les personnes dites handicapées, il y aurait lieu de considérer leur manière d’être et leurs comportements comme des variétés du fonctionnement humain, qui ont toute leur place dans la société.

Peut-être est-ce pour cette raison, celle de l’injonction à vivre dans les normes valides, que les personnes sourdes comme certaines personnes autistes ne se reconnaissent pas comme « handicapés », quand cette notion désigne des catégories de personnes à qui il manquerait quelque chose ou qui ne fonctionneraient pas selon des normes définies. Bien évidemment, elles reconnaissent que leur vie n’est pas facilitée dans un environnement validiste (entendant, neurotypique,…), qui fonctionne massivement comme si ces personnes devaient fonctionner en niant leurs caractéristiques et en adhérant aux normes en vigueur, et qui met des obstacles en définitive sur leur participation sociale.

Pour les tenants de la normalité physique, fonctionnelle ou psychique, mener une vie normale, c’est supprimer ou surmonter ce qui n’est pas la norme, la déficience, la particularité… C’est un point de vue validiste (ou capacitiste) que de considérer que la norme, le normal soit le fonctionnement humain le plus enviable et le plus légitime, source d’une domination des catégories majoritaires sur des fonctionnements minoritaires.

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