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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 19 décembre 2022

L'inclusion n'est pas compatible avec l'exclusion

L'inclusion n'est pas compatible avec l'exclusion

Formulée ainsi, l’assertion relève de l’évidence logique. Et pourtant…Le discours sur l’inclusion, consensuel s’il en est, ne devrait pas souffrir de voir se développer de nombreux phénomènes d’exclusion ou de désaffiliations. Et même, paradoxalement, une partie de ceux qui tiennent les discours inclusifs les plus volontaristes sont aussi ceux qui tolèrent nombre de situations d’exclusion, voire qui favorisent leur développement par les choix politiques qu’ils font. Ainsi, on voit le discours inclusif côtoyer l’accroissement de la pauvreté, du manque d’emploi ou de l’emploi précaire, des mauvaises conditions de vie, de la marginalisation ou de l’ostracisation de certaines catégories de population caractérisées par leur couleur de peau ou leur religion. On parle de société inclusive en verrouillant l’accès satisfaisant à cette société à nombre de personnes ou de catégories de personnes. Quant aux personnes en situation de handicap, on pourrait croire qu’elles participent pleinement d’une volonté inclusive, tant le discours les concernant est massif, alors que les situations d’exclusion, de marginalisation, de non-droits, de domination sont persistants : accès à l’école, ségrégation dans les institutions spécialisées, absence du droit du travail en ESAT, logement inclusif restreint, accessibilité à petite dose, etc.

Avec la solidarité comme mot d’ordre discursif, la société politique laisse se développer (ou ne fait rien) ou même organise la mise au ban des SDF par des dispositifs (très inventifs) les empêchant de rester en ville (pointes sur les trottoirs, accoudoirs sur les bancs…), pourchasse ou laisse mourir des migrants (on leur enlève l’accès à l’eau potable en pleine canicule, on les contrant à dormir dans le froid, on les laisse croupir sur des navires de sauvetage…), déloge, sans relogement,  des zones d’installation de roms… Le discours sur le progrès social se traduit par des régressions dans le droit du travail (précarité, souffrance au travail, priorisation au profit) et dans les droits sociaux (accusations d’assistanat ou de fraudes, non recours…).

Il s’avère que l’on se trouve ici dans une contradiction forte, une aporie même. Les valeurs de notre société apparaissent aujourd’hui, dans le fonctionnement sociétal, extrêmement discriminantes, inégalitaires, excluantes, vulnérabilisantes : des SDF à la souffrance au travail, de la répression des « racisés » à la précarité de l’emploi, et bien d’autres situations. Et ceci d’autant plus qu’aux yeux de certains, ces évolutions, ou certaines d’entre elles, apparaissent comme des progrès sociaux, labellisés comme une majoration de justice, d’égalité, d’inclusion. Dans les politiques publiques, nombre d’acteurs qui prônent ou se réfèrent à ces valeurs humanistes sont aussi ceux qui justifient de la dégradation concrète de la situation des personnes, attribuant d’ailleurs à celles-ci la responsabilité de leur situation : le chômeur est celui qui ne veut pas travailler, le pauvre est celui qui ne s’est pas adapté à la société contemporaine, le migrant aurait dû rester chez lui…

L’aporie ne peut se comprendre que si l’on regarde les principes idéologiqques hégémoniques dans notre fonctionnement sociétal. L’hyper-individualisation (du développement personnel à la primauté du droit et de la réussite individuels), ou encore le fonctionnement économique néo-libéral priorisant le profit à tout prix, au détriment du bien commun et de la préoccupation de ceux qui n’ont pas réussi, … ne laissent finalement d’autre choix, sauf sentiment de cynisme personnel, que de tenir un discours dont les termes (progrès, solidarité, nouveaux droits, inclusion) désignent des réalités contraires (régressions, concurrence et individualisme, restriction ou contraintes des droits, exclusion). C’est sur ce registre que le discours politique d’une volonté inclusive est tout a fait compatible avec des phénomènes d’exclusion. Une véritable société inclusive ne peut pourtant pas se concevoir dans la justification de quelqu’exclusion que ce soit.

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