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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

vendredi 8 janvier 2021

des dispositifs inclusifs comme marque d'une société non inclusive

Des dispositifs inclusifs comme marque d'une société non inclusive

On peut se féliciter des avancées de la société inclusive, ou plus précisément de la croissance des dispositifs inclusifs. Mais justement, cette croissance est-elle le signe d’une plus grande inclusivisation de la société, ou au contraire la résistance de celle-ci à être inclusive ? Indubitablement, le nombre et la qualité des dispositifs et organisations inclusifs est en croissance, permettant à de plus nombreuses personnes en situation de handicap d’être présents dans les institutions ordinaires (famille, école, travail, santé, logement, espace public…). Une récente publication de la DREES (Etudes et Résultats, n°1170, nov 2020, Offre d’accueil des personnes handicapées dans les établissements et services médico-sociaux fin 2018) met en évidence ces évolutions lorsque l’on compare les résultats 2014/2018.

Si l’augmentation globale des places entre 2014 et 2018, enfants et adultes confondus, se chiffre à 4,4%, ce sont les services, intervenant « hors les murs », qui connaissent la plus forte croissance (11%). Même dans les catégories qui ont connu la plus forte croissance de leur population suivie (autisme, 35% et déficiences psychiques, 22%), ce sont là aussi les services qui ont connu la plus forte croissance. Ces évolutions sont à mettre en regard toutefois sur une périodicité plus grande, où cette croissance est toute relative : le nombre de places en services pour les enfants est passé seulement de 24% à 34 % de 2006 à 2018, tandis que celui des adultes ne représente que 16% du total des places.

Les augmentations dans les services sont dus à plusieurs raisons. D’une part un glissement de certaines populations des établissements vers les services, dans le cadre de la transformation de l’offre médico-sociale concomitante à des accueils plus favorables des institutions ordinaires. Mais d’autre part dans le même temps une certaine extension des catégories de handicap ou l’intégration dans la catégorie de handicap de certaines situations auparavant non reconnues ou prises en charge par d’autres dispositifs (autisme ou maladies psychiques, troubles des apprentissages, etc…). L’on peut se réjouir de la première cause : la sortie des établissements spécialisés, la « désinstitutionnalisation », signifie une plus grande présence, sous diverses modalités et dans différentes conditions, des personnes en situations de handicap dans la société : le maintien en famille en place des internats, la présence à l’école plutôt que dans des centres spécialisés, des adultes au travail dans des entreprises ordinaires ou des entreprises spécialisées tournées vers le monde ordinaire, une plus grande accessibilité dans l’espace public. A ce titre on peut avancer que tous ces dispositifs témoignent d’une évolution sociétale qui reconnait davantage la participation des personnes en situations de handicap à la société.

Mais de l’autre côté, l’augmentation du nombre de personnes handicapées ne laisse pas d’interroger. Bien évidemment, la reconnaissance du handicap permet à ces « nouveaux » handicapés de bénéficier de droits auxquels ils ne pouvaient prétendre auparavant. Les « dys » par exemple ont gagné en aménagements, dispositifs, aides, reconnaissance, …, dès lors qu’ils ont pu être reconnus handicapés. Mais cela signifie-t-il que la société ne s’adapte que lorsque la contrainte de la présence des personnes en situation de handicap s’impose ? Car le progrès de l’inclusivisation n’existe que par le levier d’une catégorisation administrative de certaines populations, qui stigmatise de fait les personnes ainsi catégorisées. Ne peut-on être inclus que lorsque l’on porte l’étiquette du handicap ? Un certain nombre de « dys » sont ainsi scolarisés sans le projet de scolarisation issu de la reconnaissance du handicap, mais avec un projet d’accompagnement interne à l’éducation nationale, dont les réalisations ne semblent pas satisfaisantes. De ce point de vue, l’organisation et le développement de dispositifs inclusifs apparaissent au moins autant comme des symptômes de la résistance des institutions de la société à devenir inclusive que comme une inclusivisation de la société.

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