biographie

Ma photo
Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

mardi 7 mars 2023

le mot validisme fait-il peur ?

Le mot validisme fait-il peur ?

Le plus simple est de répondre à cette question comme l’a fait l’ancienne secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, Mme Cluzel : « Le validisme n’existe pas ! » Mais le déni discursif d’existence d’un phénomène social ne l’empêche par d’être une réalité. Et le déni manifeste peut manifester une peur que cette « chose » que cela représente ne vienne bousculer l’équilibre existant et le statu quo. Qu’est-ce que le validisme, qui est présenté souvent comme un épouvantail remettant en question le fonctionnement social, comme le « wokisme » par exemple. Oui, reconnaissons-le, l’approche du handicap comme une réalité issue d’un fonctionnement validiste de notre société constitue une critique radicale de ce dit fonctionnement. Elle fait rupture par rapport à l’histoire de la pensée et des fonctionnements (organisations, représentations, attitudes…) concernant les personnes en situation de handicap. Et c’est peut-être ce changement radical de point de vue, en le situant sur le plan politique, qui fait peur, qui interroge un fonctionnement d’exclusion de certaines personnes.

Pour comprendre la pertinence du questionnement posé par cette approche, il faut remonter aux origines des représentations du handicap et des personnes handicapées. Longtemps, et encore maintenant derrière un autre discours, le handicap était constitué d’un écart (d’un manque) par rapport à un fonctionnement corporel (physique ou psychique) institué comme normal. Cet écart, le handicap, était constitué de déficiences, de maladies, de troubles, d’incapacités, et avait des conséquences sur le plan social. L’imputabilité du handicap était attribuée à la personne qui dsyfonctionnait (par rapport à des fonctionnements érigés comme normes par la médecine), et absolument pas aux contextes et aux situations dans lesquelles vivaient les personnes dites handicapées.

Il fallut attendre la fin du XXe siècle pour que, face à cette conception dite médicale ou biomédicale, se dresse, menée par des personnes handicapées, une approche dite sociale, qui au contraire de la première, attribuait le handicap à la société et à l’environnement, qui constituaient des obstacles à la participation des personnes handicapées à la vie de tous : transports, logements, études, travail, mais aussi autonomie, citoyenneté, droits, inclusion… Ces conceptions conflictuelles, débattues dans les instances internationales et sur le terrain, ont abouti à des modèles explicatifs dits écosystémiques, l’un se référant à une problématique de santé (la CIF, classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé) avec l’OMS, l’autre inspiré qu’une approche anthropologique plus globale (MDH-PPH, Modèle de développement humain, processus de production du handicap). Dans les deux modèles, le handicap ou les situations de handicap sont expliquées par l’interaction entre des caractéristiques personnelles (dont les déficiences et les incapacités) et des caractéristiques environnementales qui font obstacle à la participation sociale dans les activités quotidiennes et les rôles sociaux.

Le modèle anthropologique s’est renforcé et réalimenté dans une approche politique des conditions de vie des personnes en situation de handicap, qu’on trouve dans la Convention des droits des personnes handicapées (ONU, 2006) et dans le concept de validisme. Le validisme est un système de pensée, une idéologie qui considère que la norme de la vie humaine est le fait d’être valide. Par conséquent, dans ce système tout ce qui n’est pas valide est de moindre valeur. Le validisme imprègne l’ensemble des phénomènes sociaux et la vie des personnes, comme l’explique Charlotte Puiseux dans sa biographie (De chair et de fer, La découverte, 2022), dont le sous-titre est : vivre et lutter dans une société validiste. Remettre ainsi en question le fonctionnement sociétal en interrogeant le et la politique qui cautionne et légitime le validisme et ses conséquences d’injustice, de discrimination et d’exclusion peut inquiéter ceux qui, la plupart de temps valides, qui se satisfont de la situation.

Télécharger l'article

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire