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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 13 septembre 2021

mieux entendre ou mieux accéder à

Mieux entendre ou mieux accéder à ...

Quand on parle de surdité en général, en citant par exemple le nombre de sourds et malentendants en France, on se réfère le plus souvent à une caractéristique censée réunir toutes ces personnes, celle de ne pas entendre, à aux préoccupations conséquentes, celles d’agir contre cette situation, c’est-à-dire de mieux entendre. Comme si ces personnes étaient réduites à cette caractéristique. Là où une telle caractéristique, biologique, réunit des personnes que d’autres caractéristiques culturelles, sociales ou développementales séparent ou opposent. Lorsqu’un service offre des prestations indifféremment à toutes les personnes qui ont une déficience auditive (une application, un service d’accompagnement ou de soutien, une aide technique, etc…), elles sont le plus souvent centrées sur les effets de la déficience. Elles omettent l’approche situationnelle des situations d’obstacles à la participation, à la citoyenneté, à l’accès aux droits des personnes qui n’ont pas les capacités auditives de la majorité de la population : la plupart du temps, il s’agit de mieux entendre.

De telles approches mettent en avant ce qui réunit une personne âgée qui perd progressivement son acuité auditive, un adulte devenant sourd suite à un traumatisme, un adolescent perdant l’audition ou un enfant naissant sourd. Cette catégorisation engage à poser la résolution des problèmes de ces personnes dans ce qui les réunit, l’audition : mieux entendre constitue le point de convergence de la recherche et des prestations. Les moyens de mieux entendre sont nombreux, et il est normal que ces moyens soient mis à disposition de ceux qui veulent ou ont besoin d’améliorer leurs capacités auditives : implantation cochléaire, prothèses, boucles magnétiques, applications… Nombreux sont ceux qui n’entendent pas ou mal, qui tirent profit de ces aides.

Toutes ces personnes effectivement n’entendent pas, mais pas dans les mêmes situations de vie. Alors que de telles approches unifient en catégorie unique, sous caractéristiques bio-psycho-médicales et d’aptitudes relatives à l’audition et ses conséquences, il y a des personnes dont les situations de vie n’ont rien à voir pour peu qu’on se place du côté des droits et de l’accès à ces droits. Pour peu que l’on s’intéresse aux personnes plutôt qu’à leurs imperfections anatomiques ou d’aptitudes. Un bébé qui nait sourd n’a rien à voir, sur le plan humain, avec une personne âgée qui a entendu et dont l’audition baisse significativement pour la mettre en situation de handicap.

La focalisation sur l’audition annule la diversité humaine d’entendre ou de ne pas entendre. Pou qui nait avec une déficience auditive, ne pas entendre n’est pas une a-normalie ou une pathologie, mais une caractéristique de la diversité humaine, comme d’autres naissent avec la peau noire ou avec un sexe donné. Dans cette situation, ne pas entendre est une caractéristique personnelle qui à certains moments, du point de vue de l’identité personnelle, du développement, et de la relation aux autres, mérite d’être prise en compte autrement que du seul point de vue d’une caractéristique physique.

La construction d’une catégorie de personnes (« ne pas entendre ») et d’un ensemble de réponses indifférenciées qui leur sont destinées ignore la diversité des situations, des besoins, des aspirations, des choix. Dans la perspective du mieux entendre, qui convient parfaitement à la majorité des personnes qui n’entendent pas ou plus, sont exclus, minorés ou ignorés les modèles de développement ou d’habitudes de vie qui s’appuient sur la langue des signes et la culture sourde. Car ce sont bien un dépistage auditif à J+1, des propositions d’implantation cochléaire précoce, de la rééducation orthophonique et une scolarisation « oraliste » qui sont majoritairement proposées, et non un financement pour que les parents se forment à la langue des signes avec leur enfant, pour que celui-ci puisse mieux participer à un environnement familial accessible.

Parler indifféremment des personnes qui ont une déficience auditive est un leurre qui laisse une minorité d’entre eux (les Sourds) dans un déni de droits et d’impossible accès à la société.

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