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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 24 mai 2021

inégalités scolaires et handicap

Inégalités scolaires et handicap

On pense naïvement que toute aide apportée à un élève en difficultés, parmi lesquels les élèves en situation de handicap, l’aide effectivement et favorise ses apprentissages. Mais pour évaluer ceci, il est nécessaire de mettre en perspective et de prendre en considération le fonctionnement de l’école. Il fut un temps où il y avait « deux » écoles qui ne se rejoignaient pas, « l’école des riches » et « l’école des pauvres », fussent-elles dans le système de l’Education nationale. Les espaces scolaires étaient séparés, et les finalités n’étaient pas les mêmes : les enfants des « riches » étaient destinés aux professions les plus dotées, les enfants des « pauvres » étaient destinés à devenir ouvriers, paysans ou employés. Quelques bifurcations, certaines remarquables, attestaient des possibilités d’ascension sociale, argument du mérite républicain, qui se sont élargies au fur et à mesure des besoins de l’économie, mais ne remettaient pas en cause fondamentalement les mécanismes de reproduction sociale.

L’école est devenue unique, et en principe égalitaire. Pour autant, ces mécanismes ont-ils disparu, ou se sont-ils transformés pour réaliser autrement la reproduction sociale ? Deux ouvrages, publiés récemment tentent de répondre à ces questions : Le goût de l’effort, de Sandrine Garcia (PUF, 2018) et Enfances de classe, sous la direction de Bernard Lahire (Editions du Seuil, 2019). Ils mettent en évidence la pérennité des effets des inégalités sociales sur les parcours scolaires de réussite ou au contraire de difficultés et d’échecs.

Les conditions de réussite à l’école sont conditionnées aujourd’hui non par ce qui se passe à l’école, mais par ce qui se passe à la maison et en famille. L’utilisation active des écrits, la pratique d’activités culturelles, le « modelage » des attitudes et comportements attendus à l’école (persévérance, attention, efforts), la gestion de l’épanouissement personnel et de l’autonomie, associées à des interventions directement pédagogiques intenses (leçons et devoirs, utilisation des situations de vie pour faire des apprentissages, appropriation d’attitudes, appel à d’autres ressources, choix d’orientations) constituent aujourd’hui les conditions impératives externes nécessaires à la réalisation des apprentissages à l’école. Et de nombreuses enquêtes le montrent : ce sont les parents des catégories moyennes supérieures et supérieures qui sont dotées de ces savoir-faire par rapport à l’école, permettant à leurs enfants de tirer plein profit de l’école.

Et les autres, les enfants de parents appartenant aux catégories populaires ou moyennes ? Si certains font correctement leurs apprentissages, c’est bien là cependant que l’on rencontre essentiellement ceux qui sont en difficultés ou en échec. Or les raisons invoquées à ces échecs ne tiennent pas du tout compte des facteurs externes et sociaux (sauf parfois en termes de dons ou de génétique), mais sont attribués à des caractéristiques personnelles qui sont rapidement qualifiés de troubles. Or cette médicalisation des difficultés scolaires, transformant les élèves concernés en élèves handicapés, opère en réalité un accroissement des inégalités d’origine à travers les effets induits de cette approche.

En effet, la caractérisation de trouble ou de handicap a pour effet de réduire les exigences et attendus de l’accès aux apprentissages (on n’exige pas trop). Elle renvoie les remédiations vers l’extérieur, sans interroger les présupposés et les manières de procéder en classe (les méthodes ne changent pas face à ces difficultés, et celles-ci ne peuvent que persister). Les aides et remédiations portent en général sur des activités qui sont hors du champ des apprentissages (les différentes thérapies ou suivis psy), censés rendre disponibles les enfants aux apprentissages, mais sans évaluation des effets réels, d’autant qu’ils se déroulent bien souvent sur le temps scolaire, c’est-à-dire en diminuant les temps d’apprentissage proprement dit. Dans ce contexte on peut véritablement s’interroger sur la portée véritable de ces aides à la réussite des élèves, et s’interroger sur ce type de mécanismes et de fonctionnement scolaire qui favorise ceux qui sont déjà de potentiels bons élèves, et ne fait que peu pour ceux qui ne sont pas dans les bonnes conditions d’avoir un parcours de réussite.

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