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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

vendredi 21 août 2020

Retours en institution

 Retours en institution

Il y a peu, une professionnelle me faisait part de cette situation. Elle travaille dans un dispositif d’unité d’enseignement externalisée (pour élèves sourds), qui n’a pas attendu les derniers décrets pour se délocaliser dans un groupe scolaire maternelle et élémentaire, depuis plus de vingt ans. La simple délocalisation initiale d’origine s’est peu à peu transformée en un dispositif pratiquant, pour la plupart des élèves, sur des temps variables, des temps d’inclusion accompagnée. Arrivent dans le dispositifs deux jeunes élèves, « agités » sur le plan comportemental et relationnel. Au bout de quelques semaines, l’institution scolaire (avec tous ses acteurs) fait le « constat » que ces deux élèves, même s’ils étaient accompagnés en permanence dans leurs activités, n’avaient pas leur place dans l’école. Voilà donc le service contraint de réinstutionnaliser un dispositif, de recréer un groupe (avec deux élèves !) au sein de l’institution.

Ces enfants seront-ils mieux dans ce retour à l’institution ? Rien n’est moins sûr. Et cette professionnelle, pourtant très favorable à l’inclusion, se trouve contrainte de penser que celle-ci n’est pas possible dans le contexte. Bien sûr, il y a des enfants qui souffrent énormément dans le milieu scolaire ordinaire, et cette situation n’est pas propre aux enfants en situation de handicap (le harcèlement scolaire est là pour nous le rappeler). A ce titre, des enfants en situation de handicap peuvent trouver protection dans une institution spécialisée, séparée de l’école ordinaire : moins de stress, moins de souffrance…Mais si cela s’avère juste dans certaines situations, ce n’est pas que ces enfants soient destinés par nature (parce qu’ils sont handicapés) à des établissements particuliers et spécialisés (IME, ITEP, …), mais bien parce que l’école n’est pas en mesure de les accueillir convenablement pour qu’ils aient une vie satisfaisante et qu’ils y fassent des apprentissages, ou encore parce que l’institution école n’a pas encore véritablement compris sa mission d’accueillir tous les enfants, même dans l’hypothèse d’un accompagnement adapté.
On peut regretter que les institutions perdurent, que le système institutionnel manque de places pour accueillir des enfants en situation de handicap. Est-il légitime qu’elles perdurent ? Sur le principe non : L’exclusion d’une personne de la société, hors du vivre ensemble, n’est pas légitime sur le plan éthique. On devrait par conséquent être tous favorables à l’accueil des personnes en situation de handicap dans les institutions de la vie ordinaire. Les institutions spécialisées ont été justement et légitimement critiquées : lieux d’exclusion, de non droits, d’abus, etc… L’on ne peut se satisfaire d’une telle situation, même si les conditions de fonctionnement des institutions se sont améliorées. La protection des personnes qui pouvaient justifier de leur existence ne fait plus recette face aux aspirations des personnes d’accès aux droits et aux habitudes de vie de tous.
La désinstitutionnalisation apparaît donc comme une réponse cohérente face à cette situation. A condition toutefois que les conditions de vie ou d’accueil dans les institutions ordinaires (école, travail, loisirs, citoyenneté, ville, …) ne soient pas pires que la vie en institution. L’exemple de l’école ci-dessus n’est pas isolé. On retrouve cette même difficulté du milieu du travail et de l’emploi à s’ouvrir et à accueillir des personnes en situation de handicap, pour des questions de rentabilité souvent, et parce que le milieu de travail est aujourd’hui source de souffrance, de stress, de pénibilité et de handicap. A tel point que des adultes ayant eu un « bug » au travail n’ont parfois qu’un souhait, celui de travailler dans un milieu protégé ou spécialisé !
La pérennité des institutions et les retours dans les institutions n’invalident pas la philosophie inclusive. Ils ne font que prendre acte de l’absence de transformations de la société, qui reste non inclusive. C’est l’état de la société qui explique cette situation, non des oppositions de principe au principe inclusif. La désinstitutionnalisation ne fait pas la société inclusive.

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