Dire, pour (et) ne pas agir
du 8 janvier 2019
On assiste actuellement à un étonnant phénomène de
simultanéité avec une célébration intense de l’école et de la société
inclusive, et l’existence opiniâtre de nombreuses et graves difficultés vécues
par les élèves handicapés et leur famille à faire concrétiser au quotidien le
droit, inclusif, de leur enfant à aller à l’école dans des conditions
satisfaisantes. Le réel résiste au discours. Et pourtant…
C’est un peu ce qui se produit dans un discours inclusif sur
l’école, qui masque l’absence chronique de mise en place de facilitateurs de
l’inclusion sur le terrain. « L’école de l’inclusion ou l’école de la
gesticulation » titrait la revue ASH (26 octobre 2018) à propos du suivi
des mesures annoncées par la conférence de presse Ensemble pour l’école inclusive du 18 juillet 2018. Et c’est bien
l’impression que donne ce phénomène, de créer une vérité par le discours sans
que l’on voie la réalité changer, ou même sans que l’on sache si la volonté de
changement n’est pas davantage dans le discours que dans la réalité, en parlant
au présent de l’indicatif de choses qui ne sont ni advenues, ni réalisées.
Il n’est certes pas inutile de marteler à longueur
d’intervention le principe et la volonté d’une école inclusive et de
l’inclusion des élèves en situation de handicap dans l’école : cela
contribue indéniablement au changement de regard et de représentations sur les
élèves handicapés, cela contribue aussi vraisemblablement à la prise
d’initiatives incluantes par les enseignants et les autres élèves.
Mais l’omni présence du discours a également un autre
objectif, celui de se satisfaire de ce discours, d’occuper l’espace afin de faire
croire que le discours positif sur l’inclusion reflète une réalité inclusive.
C’est ainsi que cette conférence de presse présente toutes les avancées de
l’inclusion depuis un année de gouvernement, des mesures annoncées comme
fondamentales et susceptibles de mettre en œuvre des changements radicaux, mais
qui sont essentiellement des mesures de concertation. La description des PIAL
(Pôles inclusif d’accompagnement localisés), nouvelle mesure innovante
favorisant l’inclusion, est particulièrement indigente dans son contenu, sans
que l’on sache en quoi ils se distinguent et sont plus performants que les ULIS
(Unités localisées pour l’inclusion scolaire).
Une telle utilisation du langage amène à utiliser de fausses
informations, ou à les transformer pour faire du discours tenu une véritable
infox. Ainsi, il fut annoncé la création d’une dizaine de milliers de poste
d’AESH, alors que nombre d’entre eux étaient déjà en poste sous le statut
d’AVS.
Le discours politique tenu tient donc d’une certaine
mystification : s’il ne crée pas une réalité d’inclusion, le discours
inclusif omni-présent fait fonction de création de l’inclusion, laissant de
côté les mesures concrètes nécessaires à sa réalisation et à son avènement.
Dire dispense d’agir, dire est une manière de se dispenser d’agir.
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