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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

lundi 14 avril 2025

handicap et situations de handicap

Handicap et situations de handicap

J’avoue être un petit peu agacé de constater dans de nombreux discours (politiques, organisationnels, professionnels) la confusion quasi générale entretenue entre le terme « handicap » et les termes « situations de handicap ». Comme si ces derniers avaient remplacé le premier, sans en changer le sens, la signification. Symptôme peut-être d’une occultation de paradigme inchangés. Le handicap, et l’identification « handicapé » ou « personne handicapée », renvoient à plusieurs sens, qui d’ailleurs ont varié au fil du temps. Si on se réfère à la première classification des handicaps (OMS, 1981, classification dite de Wood), le handicap constitue un ensemble composé de maladies, déficiences, incapacités et désavantage social, catégories liées par une relation univoque de cause à effet. Cette premier conceptualisation fut contestée dès son apparition, et donna lieu à d’autres classifications : PPH, Processus de production du handicap, puis Modèle de développement humain – PPH  (1998, 2020, RIPPH) et CIF, Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (2001, OMS).

Par ailleurs, en France, quand on parle de personne handicapée, on fait référence le plus souvent à un statut, obtenu en fonction de certaines caractéristiques, et validé administrativement par une reconnaissance réglementaire, par les MDPH ou les MDA. Ce statut laisse d’ailleurs de côté bien souvent, ce que l’on nomme le handicap invisible. Le terme « personne handicapée » désigne par conséquent d’abord le statut d’une personne. Au-delà de ce statut, et en raison même de cette catégorisation, il attribue à la personne une identité, celle de « handicapé ». Il n’y donc pas de problèmes à parler des personnes handicapées tant que l’on reste dans ces registres de qualification, tant que l’on fait référence à l’appartenance à une catégorie de population.

Toute autre chose est de parler de situations de handicap. La notion de situation de handicap, que l’on trouve clairement expliquée dans le MDH-PPH, relève d’une autre approche. Identifier des situations de handicap, ce n’est pas identifier les caractéristiques personnelles d’une personne (ses troubles, ses maladies, ses déficiences, ses limites, ses incapacités). C’est identifier de quelle manière une personne peut réaliser (ou ne pas pouvoir réaliser) les habitudes de vie qui comptent pour lui : est-ce que la personne peut se déplacer pour faire les courses ? est-ce qu’elle peut faire des apprentissages en maintenant son attention ? est-ce qu’elle peut jouer au foot dans l’équipe locale ? est-ce qu’elle peut avoir un contrat de travail ? etc. Si la personne est en mesure de réaliser ces habitudes de vie, y compris avec des aides (techniques ou humaines, ou avec des aménagements), sans trop de difficultés, on pourra dire qu’elle est en situation de participation sociale pour telle ou telle habitude de vie. Si elle n’est pas en mesure de réaliser telle ou telle habitude de vie qui compte pour elle, même avec aide ou aménagement, et avec quelque difficulté, on pourra considérer que la personne est en situation de handicap pour cette habitude de vie.

C’est pour cette raison que je suis agacé lorsque j’entends des propos comme : « situation de handicap intellectuel, situation de handicap moteur, situation de handicap sensoriel, etc. ». Enoncer ces formulations ne caractérise pas une situation de vie, une habitude de vie, mais les attributs de la personne, et en particulier là où cette personne trouve des limites ou a des incapacités. La notion de situations de handicap, qui est définie comme l’articulation, l’interaction entre une personne et son environnement, se trouve occultée et niée dans l’utilisation de telles formulations. Là où la notion de situations de handicap permet d’expliquer de manière écosystémique des situations vécues, de telles formulations rabattent la problématique et les explications sur les caractéristiques de la personne. Il vaudrait mieux dans ce cas utiliser les termes de handicap et personne handicapée. Les termes « situation de handicap » ne font en définitive que dissimuler une approche individuelle, et largement bio-médicale dans un langage qui simule des changements de paradigme.

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