Normes, handicap et validisme
Dans une société
conçue par et pour les personnes considérées comme valides, on demande
généralement aux personnes handicapées d’organiser leur vie et leur
comportement autour de ce dont ils sont « dépossédés », autour de ce
qui est considéré comme la norme humaine en vigueur, autour de ce qui les fait
considérer comme non valides.
Cela est particulièrement visible dans les situations vécues par les personnes sourdes (les Sourds). Malgré une reconnaissance, récente, de la langue des signes, tout est fait, dans les dispositifs et les discours sociétaux, pour que les enfants qui naissent sourds soient « normés » en enfants entendants ou pseudo-entendants. Le texte sociétal, appuyé par des textes réglementaires (législatifs, recommandations…) affirme le caractère pathologique de la condition sourde et organise dès la naissance des parcours réparateurs pour « restituer cet enfant au monde » : dépistage systématique à J+2 et diagnostic précoce, systématisation de l’implantation cochléaire précoce, incitation à l’utilisation de la langue orale (avec aujourd’hui quelques compromis en faveur de la langue des signes), dispositifs de scolarisation non bilingues (de nombreux dispositifs s’affichant bilingues ne le sont que très imparfaitement ou par défaut), des inclusions, ou plutôt des intégrations conçues sur un mode individuel et normatif, etc. Tout est fait pour que l’enfant sourd se développe comme enfant entendant, gage d’une normalité admise et souhaitée. Tous les obstacles sont mis pour qu’il ne puisse construire une identité sourde.